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Dodin, tout sauf une petite frappe

Océane Dodin

Océane Dodin - DR

A 18 ans, Océane Dodin va faire ses débuts en Grand Chelem cette nuit à l’Open Australie. L’occasion de découvrir la Française, 182e joueuse mondiale, pleine de promesses. Avec un style atypique fait de frappes surpuissantes en pagaille et d’échanges raccourcis le plus possible.

Sa partenaire d’entraînement, l’Américaine Madison Brengle, a vite dit stop. Saoulée de coups et fâchée. Pas envie de jouer la cible humaine. Séance arrêtée après à peine cinq minutes et les deux joueuses obligées de faire appel à leurs sparring-partners pour échanger des balles sur demi-terrain. A la veille de son entrée en lice à l’Open d’Australie, premier passage en Grand Chelem de sa carrière, Océane Dodin répétait une dernière fois ses gammes à Melbourne ce dimanche. Et la jeune Française, 18 ans, qui bénéficie de l’invitation réservée à la FFT, n’a pas failli à sa réputation naissante sous les yeux d’une Amélie Mauresmo et d’un Henri Leconte intrigués. Le style de la Nordiste ? Atypique. Fracassant. Elle frappe tout ce qui bouge, Océane. Pleine patate. Pas question de faire durer l’échange.

Son physique élancé – 1,83 m, 62 kg – n’est pourtant pas celui de l’emploi. Mais aucun doute dans les mots. Puissance dévastatrice sinon rien. « J’ai un jeu agressif, explique celle qui sera opposée au premier tour, dès la nuit prochaine, à l’Américaine Alison Riske, 42e mondiale. J’essaie de frapper le plus fort possible dans toutes les balles et je m’éclate en faisant ça. » Une stratégie tennistique mise en place par son père, Fred, professeur d’EPS et de tennis qui a initié sa fille à la petite balle jaune dès sa plus tendre enfance. Avec un mot d’ordre à respecter si possible : ne pas dépasser plus de trois frappes dans l’échange ! « Elle a une qualité de frappe de balle… Franchement, je n’ai jamais vu ça, s’extasie Georges Goven, l’entraîneur détaché par la FFT pour accompagner la structure de Dodin et de son père depuis juin dernier, conscient de tenir un véritable phénomène. En termes de vitesse, je ne sais pas s’il y en a d’autres comme elle sur le circuit. »

« Je déteste courir »

Des mots plein de promesses. Sur une phase ascendante après un début d’année dernière gâché par des problèmes de vertige, Océane a traversé les derniers mois comme un éclair : 40 victoires pour 8 défaites et… 682 places gagnées au classement WTA depuis mai. Championne de France des 17-18 ans et victorieuse de quatre tournois ITF (deux 25000 dollars et deux 10000 dollars) en 2014, cette fan de mode et de Maria Sharapova – et l’une des rares joueuses autorisées à porter les tenues de cette dernière – ne cache pas son envie de croquer le circuit à pleine raquette. Pour atteindre son objectif, Dodin l’ambitieuse bénéficie désormais d’une structure plus en phase avec son projet. Mais toujours avec des méthodes particulières et bien en phase avec cette jeune fille atypique.

« Ça fait sept mois que je la côtoie pratiquement tous les jours avec mon fils Mathieu qui lui sert de sparring-partner, explique Goven. On a vraiment monté une petite écurie de Formule 1. Son père s’occupe d’elle sur le plan physique. C’est une jeune fille qui n’a jamais fait un footing, par exemple. » Et l’intéressée, qui repartira sur le circuit « normal » des joueuses de son rang après l’Australie, de confirmer : « Je déteste courir. Si je le fais dix minutes, j’ai un point de côté. C’est bien d’être différente des autres. Pas mal de filles font des footings, du cardio, courent sur des tapis ou font du vélo… Mon père ne m’a jamais appris à fonctionner comme ça et je ne pense pas que cela arrivera un jour. » Pour l’instant, l’heure est à la découverte du grand monde. Le ciel semble la limite. Et celui de Melbourne risque de voir pleuvoir les puissants parpaings tennistiques.

Alexandre Herbinet avec E.S.