RMC Sport

Yoka : "Les Jeux Olympiques, c’est dix fois plus grand"

Tony Yoka

Tony Yoka - AFP

Invité ce vendredi du Super Moscato Show, Tony Yoka, encore auréolé de son titre de champion du monde amateur des super-lourds, est revenu sur sa rencontre avec les frères Klitshko, son hommage à Alexis Vastine et à son nouveau statut… lui qui a déjà la tête tourné vers de nouveaux défis et les JO de Rio 2016.

Tony, est-ce que vous réalisez ce que vous avez accompli jeudi soir ? Votre victoire et le titre de champion du monde amateur des super-lourds ?

Non, je ne réalise toujours pas. Je n’ai pas encore dormi. Je vais avoir besoin d’une bonne nuit de sommeil pour réaliser tout ça. Un titre comme ça, ça ouvre forcément l’appétit. J’ai des objectifs plus grands. Forcément, il y a les Jeux Olympiques l’année prochaine. J’ai vu les frères Klitschko. Ça donne des envies de passer chez les professionnels. C’est le début de quelque chose.

Place aux Jeux Olympiques désormais.

Je suis qualifié. Ça me soulage. C’est une pression en moins. Se qualifier était très difficile, seul le champion du monde l’était. Là, je vais pouvoir me concentrer sur ma préparation pour les JO.

Vous avez affronté de gros boxeurs lors de ces Mondiaux. Qu’est-ce qui vous a permis de faire la différence ?

Avant d’aller aux championnats du monde, j’avais dit que j’étais vraiment déterminé pour cette compétition. J’ai travaillé dur tout l’été, depuis les Jeux Européens. J’ai boxé le Croate numéro deux (Filip Hrgovic), l’Anglais numéro 3 (Joe Joyce) et le Kazakh numéro un (Ivan Dychko). J’ai vraiment pris chaque combat l’un après l’autre, sans me projeter plus loin et au final, ça a payé.

Vous battez Joe Joyce alors qu’à Bakou, lors des Jeux Européens, il vous avait dominé. Qu’est-ce qui a changé ?

Je n’étais pas prêt. Je l’avais dit d’ailleurs. Je suis vraiment parti là-bas pour me tester, pour voir ce que ça pouvait donner sur une compétition où je n’étais pas vraiment préparé pour. Au final, je termine 3e, je perds d’un point contre l’Anglais. J’ai vraiment bossé cet été. J’avais à cœur de prendre ma revanche sur lui.

Côtoyer le monde professionnel alors que vous êtes encore amateur, c’est aussi ce qui vous a permis de progresser ?

Ils m’apportent leur expérience. Ce sont des mecs qui ont plus de 30 ans. Ils ont vraiment une bonne expérience dans le monde de la boxe et de la boxe pro. Ça ne peut que me tirer vers le haut. C’est pour ça que depuis 2-3 ans, je bouge un petit peu partout. Je mets les gants avec Carlos Takam (champion poids lourds WBF en 2013), avec Johann Duhaupas. Ça me permet de ne pas rester que sur l’INSEP et d’apprendre beaucoup plus.

Les boxeurs amateurs ne portent plus de casques. C’est plus dur que par le passé ?

Je n’aime pas trop cette appellation d’amateur. On s’entraîne quand même deux à trois fois par jour. On est plus professionnel que certains pros. Aujourd’hui, ils ont changé ce mot-là et l’ont appelé la boxe olympique. C’est mieux parce que la boxe amateur, ça faisait un petit peu ridicule. On n’a pas de casque, on boxe en trois rounds de trois minutes. Des fois, on fait des matches de cinq ou six rounds. Vous pouvez le voir à ma tête, les combats sont assez durs.

« Ils (les frères Klitschko) ont pris mon numéro. On doit se voir prochainement »

Vous avez déjà disputé des Jeux Olympiques. Vous étiez à Londres, vous étiez tout jeune, vous aviez 19 ans. Dans un an, ce sera forcément différent.

Je voulais vraiment me qualifier pour les Jeux Olympiques de Londres. Mais je n’avais pas vraiment d’objectif précis en y allant. Je savais que j’étais vraiment très jeune et que j’y allais pour prendre de l’expérience. Là, on est à un mois d’un an des Jeux. Je suis champion du monde alors forcément, l’ambition c’est de faire au moins la même chose à Rio.

Ce sont les frères Klitschko qui vous ont rendu la médaille. Qu’est-ce que cela vous a fait ?

Je bégayais. J’en ai perdu mon anglais pendant l’interview. De voir Vitali et Vladimir Klitschko… c’est vraiment deux légendes de la boxe. J’étais vraiment choqué d’être à côté d’eux. Ils m’ont dit être très surpris par mon style de boxe qui n’est pas forcément commun pour un poids lourd. Ils ont pris mon numéro de téléphone. On doit s’appeler et se voir très prochainement sur un camp d’entraînement. Ça fait plaisir de voir que mon travail paie et qu’il plait à des grands noms de la boxe comme les Klitschko.

Est-ce que vous vous projetez déjà sur une carrière en professionnel ?

En soi, je suis déjà professionnel car j’ai signé à l’APB (Pro Boxing, compétition professionnelle qualificative pour les JO). J’ai fait des 6 ou 8 rounds. Maintenant, passer sur un style professionnel comme celui des Klitschko, je ne vais pas vous mentir… C’est tentant mais là je reste vraiment focalisé sur les Jeux Olympiques. Après, je verrais.

Est-ce que ce titre mondial peut vous monter à la tête ?

Non, pas du tout. Pour moi, ce n’est pas une fin en soi. C’est vraiment le début de quelque chose. J’étais venu aux championnats du monde pour me tester. Je voulais vraiment faire une compétition en étant prêt, en étant à 100 %. Je ne vais pas rester sur ça alors que les Jeux Olympiques, c’est dix fois plus grand.

« Alexis Vastine ? C’est toujours le pilier de l’équipe de France »

Vous partagez votre vie avec la boxeuse Estelle Mossely (vice-championne d’Europe des – de 60 kg). C’est quoi l’objectif : la qualification et le titre pour vous deux ?

Objectif, déjà, qualification pour les deux. J’ai rempli ma part du contrat. Elle devra faire la sienne en janvier. Mais oui objectif qualif, médaille et titre pour tous les deux à Rio.

Ce titre est forcément particulier. Il arrive quelques mois après la disparition d’Alexis Vastine, qui souhaitait se qualifier pour ces JO.

C’était un des piliers de notre équipe. Ça l’est toujours. C’est pour ça que j’ai tenu à lui rendre hommage dès que j’ai remporté cette médaille d’or. C’est aussi pour lui, forcément. Chacun des boxeurs de l’équipe de France, féminine ou masculine, pense à lui à chaque fois qu’on monte sur le ring. Et si aujourd’hui, je peux lui rendre hommage, ça fait vraiment chaud au cœur.

On s’inquiète beaucoup en général pour la boxe française. A tort, surtout en ce moment ?

Il y a eu une période creuse. Maintenant, il y a quelques champions d’Europe. Il y a Matthieu Bauderlique qui vient de faire champion du monde APB et qui est qualifié pour les Jeux. Il y a Khedafi Djelkhir qui est qualifié pour les Jeux. Il y a eu une période creuse mais maintenant, c’est vraiment pas mal.