
UFC: les confessions de Georges St-Pierre, la légende du combat... qui n’aime pas combattre
Note: cet entretien a été édité pour plus de clarté
Georges, vous êtes à Paris pour le lancement en France de votre livre Le sens du combat, dans lequel vous racontez votre parcours et ce qui vous a permis d’arriver au pinacle du MMA.
Le MMA va devenir légal en France donc c’était la parfaite occasion de venir ici pour faire la promotion de mon livre. Je parle de mon enfance, des obstacles que j’ai eus dans ma vie, et de comment j’utilise la peur pour faire en sorte que ça me rende plus fort. Pas besoin d’être un combattant pour pouvoir l’apprécier et s’en servir.
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A l’école, certains se comportaient mal avec vous et vous victimisaient. Mais quand vous êtes devenu une superstar du MMA, ils ont tenté de reprendre contact avec vous...
Quelques-uns, oui. (Sourire.) Quand j’étais jeune, j’étais victime d’intimidations. Je me faisais battre chaque semaine à l’école, ce n’était vraiment pas facile. Mais ce que j’ai vécu dans ma jeunesse, je l’ai utilisé pour ma carrière. Parfois, quand des choses mauvaises arrivent dans la vie, ça peut tourner en positif dans le futur. On peut se servir de ça pour grandir.
Comment avez-vous réagi quand vos anciens "bourreaux" ont tenté de vous rencontrer?
Je ne suis pas quelqu’un de rancunier. J’en ai rencontré un alors que je conduisais. J’étais au feu rouge et quelqu’un demandait de l’argent. Quand j’ai baissé ma fenêtre, je l’ai reconnu. Je me suis garé sur le côté et il s’est mis à avoir peur car il m’a reconnu aussi. C’est quelqu’un qui me frappait dans l’autobus quand j’étais jeune. A l’époque, il était très populaire, grand, un peu plus vieux que moi. Je suis allé le voir et je lui ai demandé ce qu’il faisait là, je lui ai dit que tout le monde voulait être comme lui quand on était jeunes et je lui ai demandé ce qui s’était passé. Je me suis rendu compte qu’il y avait un environnement très instable dans sa vie : son père le frappait, etc. En fait, la façon dont il avait appris à communiquer avec son père, c’est la façon avec laquelle il communiquait avec moi. Ce n’était pas une mauvaise personne mais un dommage collatéral, en fait. Je lui ai dit : ‘‘Redresse-toi, tu vaux mieux que ça, tu peux faire ce que tu veux dans la vie’’. Je lui ai donné l’argent que j’avais dans mes poches et il a été surpris car il pensait que j’étais fâché ou que j’aurais voulu prendre ma revanche. Plusieurs semaines après, quelqu’un est venu cogner à la maison de mes parents pour parler avec moi. C’était ce mec-là. Il voulait me remercier car grâce à mon discours, il avait un travail et sa vie allait mieux. Ça m’a vraiment fait plaisir.
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Ces problèmes rencontrés dans l’enfance sont-ils la raison qui vous a poussé vers les arts martiaux?
J’ai commencé les arts martiaux, par le karaté, pour pouvoir me défendre. Mais c’est devenu une passion, un plaisir. J’ai grandi dans un environnement difficile, je me faisais battre à l’école, la vie n’était pas facile à la maison et on avait des problèmes, mon père buvait beaucoup d’alcool même si je suis très fier de lui aujourd’hui car il a tout arrêté il y a quelques années. Entre tout ça, le seul endroit où j’étais bon, c’était à l’entraînement. C’était l’endroit où je pouvais me faire valoir, où je me sentais bien. J’ai commencé à faire des compétitions et à récoler des médailles. Et quand j’ai vu Royce Gracie gagner le premier UFC, j’ai été inspiré. Il était beaucoup plus petit que ses adversaires et beaucoup moins intimidant. En le voyant gagner, ça m’a fait penser à moi quand j’étais plus jeune et que je me faisais tabasser à l’école par des gens plus gros et plus intimidants. Mais lui, contrairement à moi à l’époque, il gagnait ses combats. J’ai vu ça comme une source d’inspiration, comme quelqu’un que je voulais devenir. Dès l’adolescence, je me suis donc tourné vers le MMA, j’ai commencé à apprendre le jiu-jitsu brésilien, la lutte olympique, la boxe anglaise.
"Ceux qui m’insultaient et me critiquaient, ce sont eux qui m’appellent et me supplient pour avoir un entretien"
Beaucoup expliquent qu’on n’a jamais vu de combattant aussi complet que vous à l’UFC. Comment avez-vous pu développer des qualités aussi importantes dans tous les domaines du MMA?
Il y a d’abord un côté génétique. Si j’étais né avec un handicap, je n’aurais jamais pu être un bon athlète. Je travaille aussi très fort. Quand j’ai un but en tête, je suis obsédé. On pourrait dire que j’ai un trouble obsessionnel. Et ce côté excessif, je l’ai mis dans le MMA plutôt que dans l’alcool ou dans d’autres trucs qui auraient pu me poser des problèmes. Il y a aussi un côté chance. J’ai rencontré les bons mentors et j’ai été au bon endroit au bon moment. Pour moi, l’art du combat, c’est l’art de la guerre. Le savoir est une arme et c’est la chose la plus importante. C’était important pour moi d’apprendre plusieurs techniques de combat car plus on est complet, plus on est capable d’être le concurrent parfait pour notre adversaire.
Le MMA va être légalisé en France et l’UFC devrait organiser un événement chez nous dès l’année prochaine. Quel est votre message pour tous les détracteurs du MMA en France?
Quand j’ai eu mon premier combat à Montréal avec l’UFC, contre Matt Serra, c’était le premier événement UFC au Canada, où ce sport n’était pas très connu et avait une mauvaise réputation, un peu comme en France aujourd’hui. J’ai repris mon titre et le lendemain, il y avait un article en première page du journal. J’étais en photo en train de frapper Serra depuis le dessus et il était écrit en anglais: 'Les barbares ont battu le record d’assistance des Canadiens de Montréal', notre équipe de hockey qui est le sport le plus populaire chez moi. J’ai gardé cet article car ça me faisait rigoler. Et les gens qui ont écrit cet article, qui m’insultaient et me critiquaient beaucoup, ce sont eux qui m’appellent et me supplient pour avoir un entretien aujourd’hui. La roue tourne. Ça passe par l’éducation.

C’est-à-dire?
Quelqu’un qui ne connaît pas peut voir ça comme une bagarre de rue. Il faut de l’éducation pour pouvoir apprécier ce qui se passe. Le foot, votre sport national, n’est pas très populaire chez moi. Il n’y a pas beaucoup de buts et c’est ennuyeux pour nous. Mais j’apprends à connaître ce sport de plus en plus et désormais je n’apprécie plus seulement les buts mais les jeux de passe ou les déplacements des joueurs. Le MMA, c’est la même chose. Quand tu commences à comprendre ce qui se passe, par exemple au sol où il y a beaucoup de technique et où celui qui est en-dessous n’est pas forcément en train de perdre le combat. Ce n’est pas un divertissement fait pour tout le monde, c’est sûr. C’est violent, comme le rugby ou la boxe anglaise. Mais c’est un sport qui gagne à être connu.
Quel combat vous a le plus marqué dans votre carrière?
Le plus beau souvenir, c’est à Montréal contre Serra. C’était la première fois que je pouvais me battre devant ma famille, mes parents, et qu’il y avait un événement UFC sur le sol canadien. C’était exceptionnel pour moi. J’ai repris ma ceinture alors que je revenais d’une défaite humiliante. J’ai beaucoup appris de mes défaites. Je ne pense pas qu’on doive juger une personne pour ses défaites ou ses victoires. Mais on peut juger une personne sur la façon dont il revient d’une défaite. Ça montre votre force de caractère. C’est ce que j’ai démontré dans ce combat. Il y a aussi ma victoire contre Matt Hughes. C’était la première fois que je gagnais le titre. Mais j’étais jeune et naïf. Quand j’ai gagné le titre, ma vie a changé et je me suis un peu fait monter la tête. Ça arrive à de nombreux athlètes.
"J’étais prêt à prendre ce risque pour avoir la vie de rêve que j’ai eue"
Un peu comme Conor McGregor ces derniers mois?
Oui mais je n’ai jamais été quelqu’un d’arrogant ou qui manque de respect en public. Je me suis enflé la tête dans le sens où je commençais à croire vraiment que j’étais le meilleur, même si ça n’existe pas car il y a toujours quelqu’un qui va pouvoir te battre, comme dans tous les sports. Ce n’est pas toujours le mec le plus fort qui va gagner mais celui qui va faire le meilleur combat, avec la même stratégie. Tu peux peut-être battre quelqu’un neuf fois sur dix mais si cette soirée-là est mauvaise pour toi, il va gagner. La définition d’être champion a beaucoup changé selon moi. Être un champion, c’est être capable de performer quand ça compte. Beaucoup de gens peuvent performer à la salle de sport ou à l’entraînement. Mais le soir du combat, avec le trac, la peur...
On parle parfois de "champions du sparring". Vous, c’était l’inverse...
Je suis bon pour performer quand ça compte, oui. Quand il y a la peur, le stress, c’est là que je performe à mon meilleur.

Que répondez-vous à ceux qui disent que vous êtes un meilleur athlète que combattant?
Ils ont raison. Je suis un meilleur athlète que combattant. En vérité, je déteste me battre. La raison pour laquelle j’ai combattu, ce n’est pas parce que j’aime me battre dans une cage. Je me suis battu pour cinq choses. Il y avait beaucoup d’argent à faire, la gloire, le respect, il y avait aussi les femmes quand j’étais plus jeune, pour être honnête c’est ça qui nous motivait. (Sourire.) Et puis il y a la liberté. Dans ma vie, j’ai beaucoup de liberté. Pour avoir ces cinq choses-là, je dois combattre. Mais je n’ai jamais aimé combattre. Les gens vont dire que c’est un peu ridicule comme raisonnement mais si on y pense, tous ceux qui travaillent ont un pourcentage de leur travail qu’ils n’aiment pas. Ils n’aiment jamais tout à 100%. Je combattais souvent deux fois par an, ça donne un pourcentage très bas que je n’aimais pas. J’aime l’entraînement, le côté méthodique, le jeu d’échecs de la chose, la liberté que ça me procure, l’accès à une certaine qualité de vie. Mais ça peut aussi virer au cauchemar car des combattants peuvent être blessés. J’étais prêt à prendre ce risque pour avoir la vie de rêve que j’ai eue.
Une question qui excite tout le milieu: êtes-vous vraiment retraité?
Je suis vraiment retraité. Il y a beaucoup de questions qui circulent sur mes envies de retour mais je suis heureux où je suis en ce moment.
"Les choses ont changé et je pense que les chances sont très minces pour un combat contre Khabib"
Vous aviez pris une première retraite en 2013...
Je n’avais pas pris ma retraite. J’avais dit que j’avais besoin d’une pause. J’étais en dépression et je me prenais la tête avec l’UFC sur les contrôles antidopage. Je trouvais qu’il y avait trop de monde qui trichait dans ce sport et j’avais raison, on a vu ce qui s’est passé depuis avec l’USADA et plusieurs champions qui sont tombés mais je le savais depuis longtemps car quand on est dans le sport, on voit vraiment ce qui se passe. Et c’était dégueulasse. A l’époque, j’étais aussi dans une période de stress, j’avais trop de pression depuis trop longtemps. Être champion est aussi un prix à payer. Ce que j’ai toujours détesté le plus dans mon sport, c’est le stress, la peur de l’humiliation, de ne pas pouvoir performer, de se blesser, de travailler si fort pour perdre à la fin. C’est insupportable. C’est ce dont je parle dans mon livre: comment faire pour tourner cette peur en côté positif. La peur peut être quelque chose qui nous paralyse ou qui nous donne la force, qui fasse en sorte que notre temps de réaction et de décision devient plus rapide.
Deux ans après votre dernier combat, la rumeur évoque aujourd’hui un possible retour contre Khabib Nurmagomedov. Si les conditions sont réunies, c’est-à-dire une bonne bourse, seriez-vous prêt à revenir pour ce combat?
Nous avons essayé d’organiser ce combat avant que j’annonce ma retraite. Tout était en place et organisé avant le combat de Khabib contre Conor McGregor.
A quel poids?
On a demandé à l’UFC de le faire à 155 pounds (limite des légers, dont Khabib et le champion, ndlr). Ils ont refusé. Ensuite on a dit qu’on le ferait à un catchweight, comme ça si Khabib perdait, il n’aurait pas perdu sa ceinture et il n’y avait pas de problème. L’UFC a catégoriquement refusé, ils ne voulaient rien savoir et disaient qu’il y avait d’autres plans pour Khabib. J’arrive à comprendre pourquoi c’est un risque qu’ils ne veulent pas prendre. Ils auraient fait ce combat juste pour un coup d’argent, car ça aurait ramené beaucoup de monde en pay-per-view, mais maintenant qu’ils ont un deal avec ESPN, ça a tout changé. La stratégie était que si Khabib battait Conor, il prendrait ensuite le micro pour dire: 'Je veux me battre contre GSP'. Il le voulait, moi aussi. L’UFC dit toujours que les fans sont sa priorité numéro 1. Là, avec la pression des fans, ils n’auraient pas eu le choix de ne pas organiser ce combat. Malheureusement, on sait ce qui est arrivé après le combat, la bagarre générale, des suspensions, etc, et ça a tout gâché. Ce n’était pas prévu dans le plan. Malheureusement, les choses ont changé et là je pense que les chances sont très minces pour un combat contre Khabib.
Dana White a pourtant enfin dit qu’il était enclin à l’organiser...
Je pense qu’il est enclin à l’organiser... Dana White change souvent d’idées. Et il dit ce que les fans veulent entendre. Premièrement, il y a Tony Ferguson et il mérite ce combat plus que tout le monde. Je voulais le faire mais les choses ont changé. Là, j’ai 38 ans, je ne rajeunis pas. (Sourire.) C’est comme dans le business. Quand on fait une offre d’affaire à quelqu’un, il peut la prendre ou la refuser. Et l’UFC l’a refusée. Les choses ont changé depuis, la structure de l’UFC, moi qui deviens de plus en plus vieux... Comme en affaires, tu ne peux pas revenir un an après et dire: 'Finalement, l’offre que tu m’as faite, je vais la prendre'. Le business ne marche pas comme ça et c’est la même chose pour la vie d’un athlète. Mais si jamais il y a quelque chose qui se passe et que l’UFC veut organiser ce combat, ils savent où me trouver.
"Usman-Covington? celui qui va gagner la guerre au niveau des projections va gagner le combat"
Vous êtes donc au moins disposé à écouter l’offre?
Je suis quand même disposé à écouter l’offre et je m’entraîne toujours. Mais je ne m’entraîne pas pour la compétition, c’est ça que les gens ne comprennent pas. Je m’entraîne pour le plaisir, car j’aime ça. Même sans combat, même à la retraite, je vais toujours m’entraîner. Jusqu’à la mort.
On a vu que Khabib serait motivé à l’idée de ce combat, qu’il vous avait titillé sur cette question quand vous avez posté sur Instagram une photo pendant un jeûne de trois jours sans eau.
Je fais des jeûnes depuis deux ans, depuis mes problèmes après le combat contre Michael Bisping. J’en fais pour ma santé, pour mon bien-être, pas pour le combat. Et je ne m’entraîne pas pour le combat mais pour moi-même. Les choses que je fais dans la vie, je ne les fais pas pour les autres.

Parlons des combattants français. Qui peut selon vous devenir une star à l’UFC?
Je vais en choisir deux. Il y a d’abord Mansour Barnaoui, un talent exceptionnel qui a gagné un tournoi à un million de dollars. Il s’entraîne souvent avec nous à Montréal. C’est un combattant au talent exceptionnel, très discipliné, un modèle à suivre, très jeune et avec un futur incroyable. Il y a également Ciryl Gane, qui a combattu au Canada, champion du TKO. Je le connais moins personnellement mais côté talent, c’est exceptionnel aussi. Il a gagné son premier combat à l’UFC et j’ai hâte de voir la suite pour lui. Je leur souhaite bonne chance. J’ai toujours un truc pour les combattants francophones. C’est comme une confrérie. Les Français, je les appelle mes cousins. (Sourire.)
Le 14 décembre, lors de l’UFC 245, Kamaru Usman affronte Colby Covington pour la ceinture des welters, que vous avez si longtemps portée. Comment voyez-vous ce combat?
Ce sont deux styles très similaires et je pense que ça va se jouer au niveau de la lutte. Au niveau du striking, les deux sont très bons mais leur jeu se fait sur la lutte. Ils utilisent le même style : ils aiment aller au corps-à-corps, pousser l’adversaire contre la cage et travailler de cette façon. Moi, quand je combattais, je me servais du contrôle des distances pour mettre mes adversaires au sol avec une entrée rapide. Eux ont un peu le même style que Khabib. Moi, c’était plus dynamique. Ce n’est pas que c’est meilleur ou moins bon mais c’est différent. On a besoin des deux. Eux préconisent ce style, c’est leur force, et celui qui va gagner la guerre au niveau des projections va gagner le combat.
"Ce n’est pas nécessairement les coups à la tête dont j’avais peur mais le stress"
L’ancien champion de la catégorie a-t-il un pronostic?
Mon cœur est avec Kamaru Usman. Je trouve que c’est quelqu’un de plus respectueux. Je ne connais aucun des deux personnellement mais avec ce que je vois, je préfère Usman. Mais ça ne me surprendrait pas que ça aille de l’autre côté donc je dirais que c’est du 50-50.
Si vous faisiez un retour chez les welters, y aurait-il un combattant que vous aimeriez affronter plus que les autres?
Je ne veux pas revenir, je suis bien à la retraite. Mais la chose la plus excitante pour un combattant qui fait ça non seulement pour l’argent mais pour la légende et l’héritage, c’est combattre contre quelqu’un qui a une aura d’invincibilité, qui semble imbattable. C’est le truc le plus apeurant mais aussi le plus excitant. Je ne suis pas différent des autres et je suis toujours compétiteur dans le cœur. Mais il faut être réaliste. Il y a une chose qu’on ne peut pas battre, c’est le temps. Beaucoup de combattants ont essayé de revenir mais l’ont fait trop tard. On peut penser à la boxe avec Muhammad Ali qui a trop combattu et aurait dû s’arrêter avant, au top. Mais en tant que combattant, on ne sait jamais quand il faut s’arrêter. On pense toujours qu’on peut en faire un autre, puis un autre, puis un autre... Il faut écouter son entourage. J’ai la chance d’avoir de bons amis avec moi. Si vous me posez la question après un entraînement, quand je fais du sparring et que je tourne avec les combattants actuels qui sont dans la salle, je vais vous dire: 'Oui je veux revenir, ça me tenterait de me battre contre Khabib ou contre le vainqueur du combat Usman-Covington'. Mais le soir quand je reviens chez moi ou le matin quand je me lève, la réponse est différente. Je n’ai plus besoin de ces 'drames' dans la vie.

Que voulez-vous dire?
Le stress, c’est ce qui m’inquiète le plus. On sait que c’est la cause de plusieurs maladies. Ce n’est pas nécessairement les coups à la tête dont j’avais peur mais le stress. Je suis quelqu’un qui n’a pas eu beaucoup de dommages en combat, j’étais plus un technicien, je m’entraîne d’une façon intelligence, je n’ai jamais pris de drogue ou rien, mon corps est bien, en bonne santé, et je veux que ça reste comme ça.
Israel Adesanya, qui vient d’unifier la ceinture des moyens, est la nouvelle superstar de l’UFC. Que pensez-vous de lui?
C’est un spécialiste. Quelqu’un qui est très fort dans le pieds-poings, debout. Un talent exceptionnel. Par contre, j’aimerais voir un combattant qui essaie de le prendre à l’extérieur de sa zone de confort. On n’a pas vu ça encore. Après avoir vu un tel combat, je pourrai dire: 'Wow!' Je pense qu’il est exceptionnel mais je pense aussi que l’UFC sait comment monter un athlète. C’est normal d’ailleurs, c’est le business. Il est très charismatique, vraiment très fort. Mais j’aimerais vraiment voir comment il réagit face à un autre style.
Vous avez été champion des moyens. Aimeriez-vous l’affronter?
(Rires.) Comme je vous dis, moi, je suis à la retraite. Je ne veux affronter personne.
Le combat que tout le monde voulait voir, c’est vous contre Anderson Silva. Et Israel Adesanya est vu comme le nouvel Anderson Silva. Alors, peut-on penser à un GSP-Adesanya?
Adesanya, je dirais même qu’il est encore plus spécialisé que ne l’était Silva, qui avait un très bon sol. Au niveau du grappling, je pense que Silva a l’avantage. Mais peut-être que tout le monde sous-estime Adesanya et qu’il est très bon au sol. Il y a une seule façon de le savoir, c’est de l’amener où on pense qu’il n’est pas confortable mais personne n’a encore été capable de le faire.

Que pensez-vous des déboires de Conor McGregor, qui fait plus parler de lui pour ses affaires extra-sportives que dans la cage?
C’est malheureux. C’est quelqu’un qui est jeune, qui est encore dans son prime, dans la force de l’âge. C’est souvent le danger. Ça m’est arrivé quand j’ai gagné mon premier combat pour un titre mondial. Je n’ai pas fait de conneries au niveau public mais j’avais changé mentalement, j’avais pris une sur-confiance. C’est le danger et il ne faut pas que ça arrive. C’est peut-être ce qui lui est arrivé. Souvent, les gens changent avec le succès et l’argent. C’est peut-être ce qui est arrivé avec lui. Mais il va peut-être avoir la chance de se reprendre et de revenir.
Que voyez-vous comme différence entre l’UFC de l’époque où vous étiez champion et celle d’aujourd’hui?
Ça a beaucoup changé. Avant, c’était un peu plus comme une entreprise familiale. Tout le monde se connaissait, c’était très amical. Maintenant, c’est très business. C’est comme ça. Les combattants professionnels à l’UFC ne doivent faire aucune faveur car on ne va en avoir aucune en retour. Les athlètes doivent comprendre qu’ils doivent gérer leur carrière comme un business. Mais souvent, ce n’est malheureusement pas ce qu’ils font.
Beaucoup de combattants vont ont rejoint à Tristar, à Montréal. Comment se passe l’accueil de nouveaux talents?
Ça fait longtemps que ça se passe et c’est toujours un plaisir de recevoir des gens de l’extérieur, de pouvoir échanger et s’entraîner ensemble. Il y a quelques années, je manquais de partenaires d’entraînement. Je tournais avec des gens qui avaient des boulots normaux: un était ingénieur, un autre travaillait dans la construction, un autre était un concierge ou peu importe. Ils s’entraînaient avec moi et après ils partaient travailler. C’était normal. Mais maintenant, c’est vraiment une salle où il y a des combattants professionnels qui font ça à temps plein. Ça change la dynamique et le niveau a beaucoup augmenté.
Comment imaginez-vous le très attendu Diaz-Masvidal prévu à l’UFC 244 pour la ceinture BMF?
C’est un combat pour savoir qui est le plus méchant. (Rires.) Je l’attends aussi et c’est sûr que je vais le regarder alors que je ne regarde plus tous les combats désormais car il y en a trop. Si c’est un combat qui se finit rapidement, je pense que Masvidal va gagner. Mais si c’est un combat qui va à la distance, une guerre avec un rythme un peu plus lent mais plus long, c’est Nate Diaz qui va gagner.
Un petit mot pour finir?
La grande nouvelle pour vous, c’est que le MMA va être légalisé en France. C’est dommage, j’aurais aimé que ça se fasse plus tôt car ça a toujours été un de mes rêves de combattre en France. J’espère que d’autres vont avoir l’occasion de le faire.