
Boxe: pourquoi il ne faut pas attendre un "vrai combat" du retour de Tyson
Le rappel à l’ordre en avance s’est fait sur l’application Zoom. Il y a quelques semaines, à l’heure de définir les contours de leur futur combat exhibition, qui aura lieu le 12 septembre au Dignity Health Sports Park de Carson (banlieue de Los Angeles), Mike Tyson et Roy Jones Jr ont conversé via visioconférence avec Andy Foster, directeur exécutif de la commission athlétique de l’Etat de Californie (CSAC). Et si les vidéos d’entraînement de l’ancienne terreur des rings avaient fait fantasmer l’idée d’un "Iron Mike" de retour dans toute sa brutalité, Andy Foster a tenu à adresser un message clair aux boxeurs de 54 (Tyson) et 51 ans (Jones Jr): "Ne commencez pas à essayer de vous tuer".
"Je ne veux aucun blessé"
L’exhibition – prévue sans public, crise sanitaire oblige – entre le plus jeune champion du monde de l’histoire des lourds et son compatriote sacré dans quatre catégories différentes en sera bel et bien une: huit rounds de trois minutes chez les lourds, avec des gants de douze 'onces' contre dix pour ceux habituellement utilisés dans cette catégorie (340 contre 283 grammes), ce qui permet moins d’impact dans les coups, et sans protection à la tête. Et sans aucune envie chez la commission athlétique locale de voir un KO, pourtant seule manière (avec un abandon) d’obtenir un vainqueur en l’absence de juges pour tenir le score. "Je voulais qu’ils m’assurent qu’ils avaient bien compris l’idée, explique Andy Foster au site BoxingScene. (…) On ne peut pas tromper le public en lui faisant penser que c’est un vrai combat ou quelque chose qui s’en approche. Ils pourront y aller un peu mais je ne veux aucun blessé. Ils connaissent notre accord."
De quoi faire sourire le dirigeant de la CSAC quand on évoque avec lui les cotes déjà mises sur le "combat" par des bookmakers de Las Vegas alors qu’il espère tout sauf un KO: "Comment peuvent-ils faire cela alors qu’il n’y aura pas de juge?" Avec un total de 105 années au compteur, le président de la commission athlétique californienne cherche avant tout – et à raison – la sécurité pour ses deux pugilistes quinquagénaires. "Ils peuvent montrer leurs qualités de boxeurs mais je ne veux pas qu’ils donnent tout pour se blesser l’un l’autre, appuie encore Andy Foster. Ils vont faire du sparring engagé mais ils ne doivent pas chercher le KO. Ce n’est pas de la boxe de championnat du monde. C’est seulement ce que c’est, une exhibition, et pas plus. Ces gars ne doivent pas être mis KO mais le public va pouvoir voir combien Mike et Roy sont toujours en forme."
"Il y a des moments où ça va chauffer, le job de l'arbitre sera de mettre de la glace"
La présence de l’expérimenté arbitre Ray Corona ira dans ce sens. Le troisième larron dans le ring cherchera en effet, dixit Foster, à calmer les ardeurs plutôt qu’à alimenter une course à la férocité. "Toutes nos règles vont être suivies et ça va ressembler à un combat de boxe, comme on le voit parfois dans des exhibitions de la sorte, précise le directeur exécutif de la CSAC. Ils peuvent bouger dans le ring et faire de l’argent. Mais je leur ai dit: 'Si vous avez une coupure, c’est terminé'. Nous serons raisonnables. Ray ne laissera personne être blessé. Il comprend ce qu’est une exhibition. Ce n’est pas un vrai combat. (…) Je suis sûr qu’il y a des moments où ça va chauffer. Le job de Ray sera de mettre de la glace là-dessus sans tuer le truc non plus. Il est le genre d’arbitre qui peut faire cela, le bon arbitre pour ce genre de combat."
Pour savoir à quoi s’attendre, même si son adversaire sera d’un autre calibre, il faut se tourner vers le passé. En 2006, l’année qui suivait la fin de sa carrière professionnelle, Mike Tyson avait pris part à une exhibition contre l’ancien lourd Corey Sanders, événement qui devait lancer le "Mike Tyson World Tour", série d’exhibitions pour aider "Iron Mike" à payer ses dettes financières de l’époque mais qui ne connaîtra qu’un seul épisode. Les deux avaient boxé en t-shirt et Sanders, seul à porter une protection à la tête, n’avait quasi pas lancé de coups significatifs. Un coup de Tyson avait fini par l’ébranler mais l’ancien champion du monde des lourds avait "porté" son "adversaire" pour l’empêcher de tomber. Le combat avait duré quatre rounds, sans vainqueur annoncé, et la foule avait manifesté son mécontentement sur le spectacle proposé dès la première reprise. Rien de fascinant quand on aime le noble art, quoi.
50 millions de dollars
Seule certitude: la version Tyson-Jones Jr va rapporter gros. Selon CNBC, l’application Triller a payé un peu plus de 50 millions de dollars pour l’exclusivité des droits de streaming en pay-per-view pour cette exhibition! Au micro de TMZ, Roy Jones a indiqué que la chose pourrait lui rapporter 10 millions de dollars si les ventes de PPV sont au rendez-vous. Mike Tyson, lui, va suivre ce qu’il avait toujours annoncé comme il l’a confirmé à TMZ: "Tout ira à différentes œuvres de charité. Personne ne doit se soucier du fait que je fasse ça pour l’argent. Je ne vais rien prendre. Je suis juste content de faire ça car je peux le faire." Un représentant de l’ancien champion du monde des lourds a depuis précisé qu’il s’agirait d’une "donation substantielle pour aider ceux affectés économiquement, médicalement et socialement par la pandémie" dont le montant exact serait "déterminé après le combat". "Iron Mike", qui aimerait faire d’autres exhibitions dans le futur dans le cadre de sa Legends Only League si cette première est une réussite, pourrait donc tout de même ramasser quelques billets directement dans son portefeuille.