
Lamy-Chappuis : "J’espère que d’autres vont prendre la relève"

Jason Lamy-Chappuis - AFP
La dernière à Chaux-Neuve
« J’ai l’impression que c’est la tournée des dernières : la dernière Coupe du monde, la dernière en championnats du monde et là, la dernière en France. Je trouve que c’est un beau clin d’œil de terminer chez moi. C’est sympa de faire ça en famille et avec les proches. Des athlètes d’autres nations sont venus me voir en me demandant pourquoi j’arrêtais dès maintenant, alors que je suis jeune (Jason Lamy-Chappuis a 28 ans, ndlr). Mais j’ai d’autres projets. J’ai l’impression d’avoir fait ce que j’avais à faire dans le combiné nordique. Je suis au plus haut depuis 2010. Cinq années de fortes émotions. Je suis vraiment heureux. Ça va me faire bizarre surtout quand la Coupe du monde va recommencer et que je serai sur les bancs de l’école (il prépare ses brevets de pilote, ndlr). »
Le plus grand combiné français
« On me comparait beaucoup à Fabrice Guy et sa belle carrière. J’ai réussi à durer un peu plus dans le temps. Ça fait bizarre à dire, mais c’est vrai que dans le combiné français, je suis le plus gros palmarès. J’espère que d’autres vont prendre la relève. Quand on regarde les chiffres, je ne me rends pas compte de ce que j’ai réalisé. Je m’en suis aussi rendu compte à Oslo, pour la dernière Coupe du monde, durant laquelle d’autres athlètes sont venus me féliciter pour ma carrière. C’étaient des mots touchants qui me font prendre conscience que ma carrière est très belle (26 victoires en Coupe du monde, 59 podiums, 1 victoire et 12 podiums par équipes, 10 médailles mondiales dont 5 en or, 3 Coupes du monde et un titre olympique, ndlr). »
La naissance d’un champion
« Quand j’étais jeune, en Coupe d’Europe, c’était encore trop loin. C’était inatteignable. C’est en 2003, quand on fait une médaille par équipes aux championnats du monde junior avec les quatre même que cette année (Braud, Laheurte, Lacroix et Lamy-Chappuis) et que je gagne le festival olympique de la jeunesse européenne, que je me rends compte qu’on est pas mal et qu’on a le niveau contre les Allemands, les Norvégiens, les Autrichiens…
En 2004, je marque mes premiers points en Coupe du monde à Oslo et en 2006, je fais 4e aux JO de Turin. En trois ans, je suis passé d’un stade où je me demande si je peux participer à une Coupe du monde à une quatrième place olympique. A Turin, j’avais 19 ans. Je n’avais que l’insouciance. Ça m’a donné envie de m’investir encore plus. Ce n’était pas une déception. Ça m’a donné envie de vivre ces moments exceptionnels. C’était une bonne surprise. »
Le rêve exaucé à Vancouver
« Il y a un avant et un après Vancouver. J’ai changé de statut par rapport au monde sportif et aux gens autour de moi. Et puis je réalise un rêve de gosse. En 2010, je domine la Coupe du monde et je deviens champion olympique en étant favori. Les cinq années qui suivent sont un peu les montagnes russes. Quand on a gagné une fois, les 2e ou 3e places sont un peu moins bien. Il y a un peu plus de pression. On prend cela de manière plus négative. J’étais plus exigeant avec moi-même. C’est un peu plus fatigant. »
A Sotchi, le porteur du drapeau en difficulté
« C’était de l’incompréhension et de la fatigue. J’arrive là-bas motivé, mais je ne me sentais pas au top. Je termine 35e de la première compétition. Je ne comprenais pas pourquoi j’étais si bas. A ce moment, je voulais vraiment penser à autre chose. Etre porteur de drapeau n’est pas un poids ou une charge. Ce sont des moments exceptionnels. Je ne regrette rien. Rentrer dans le stade olympique lors de la cérémonie d’ouverture, c’est une émotion incroyable. Après, je n’étais pas dans les dimensions mentales optimales. Je me suis mis trop de pression.
Je voulais ne pas rater. Je n’étais pas dans l’optique de réaliser mes rêves, mais d’être digne de mon rang. Je pense que je n’étais pas assez solide mentalement pour ça. Arrêter m’a trotté dans la tête. Je me suis demandé si j’avais la motivation de m’entrainer tous les jours. Finalement, je me retrouve en juin avec le groupe, ça m’a redonné envie. Il y avait également cet esprit de revanche. Je voulais montrer que je n’étais pas à mon niveau à Sotchi. Je voulais gagner en Coupe du monde. C’est ce que j’ai fait (à Ramsau, en décembre 2014, ndlr). »
Son avenir et celui des Bleus
« Nous sommes deux piliers à arrêter avec Sébastien (Lacroix). Nos départs vont créer un bon vide. Sur le long terme, je ne me fais pas de souci car une bonne équipe de jeunes arrive. L’année prochaine, en revanche, risque d’être plus difficile avec les jeunes qui manquent encore d’expérience. Je serai toujours proche de mes coéquipiers. J’ai envie de regarder ce qu’ils font. Si j’ai l’opportunité, j’irai les voir en compétition. Je vais rester proche de ce milieu, même si mes études risquent de me prendre du temps. Là, on rentre dans le vif du sujet. J’ai mon brevet de pilote privé, mais je commence par correspondance au mois de mai, le brevet de ligne théorique. Six à huit mois de travail et je pourrai commencer la pratique. Je n’ai pas encore décidé l’école. J’aurai un an pour passer la formation pratique et avoir le brevet de pilote professionnel. »