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M. Fourcade : "Mieux que dans un rêve d’enfant"

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TAULIERS DE L’ANNEE. Victorieux de deux titres olympiques (individuel et sprint) et d’une médaille d’argent à aux JO Sotchi, Martin Fourcade a porté haut la bannière tricolore cette année. Le Pyrénéen de 26 ans ouvre la boîte à souvenirs.

Martin, quelle image vous reste-t-il de cette année olympique ?

L’image forte, c’est le moment où je franchis la ligne et les quelques minutes qui suivent. Il faudrait que je l’écrive car si ces souvenirs durent, ils peuvent aussi vite s’en aller car on part sur d’autres projets. C’est une année qui a été fantastique et quelques images resteront gravées à vie. Ce sont des moments où on retrouve des copains, des sourires, des moments de partage. J’ai vécu une aventure humaine pendant ces quatre années à la recherche de l’or olympique. Partager ça avec mon équipe et mes amis a rendu la chose plus belle. C’était une quête difficile car c’était le dernier titre qu’il me restait à décrocher, sans doute celui pour lequel j’ai le plus travaillé mais celui aussi pour lequel les émotions étaient les plus intenses.

Vous rappelez-vous de cette montée en puissance vers Sotchi depuis les Jeux de Vancouver en 2010 ?

Oui, c’est quelque chose que j’ai voulu, c’est quelque chose que j’avais énormément planifié pour être le plus performant possible. Je m’en souviens car tout s’est déroulé comme dans un rêve. J’ai réussi à rentrer dans les temps de passage et j’ai atteint mes objectifs.

Vous débutez les Jeux par une sixième place en sprint. Le doute s’est-il installé ?

Non, car je m’étais aussi préparé à ne pas gagner. On a beau dominer sa discipline, être le meilleur mondial, gagner un titre olympique est quelque chose d’incroyable, de magique et je m’étais préparé à ce que la magie n’arrive pas. Je suis resté serein sur mon niveau, j’ai regardé les temps de passage. Je me suis dit que je pouvais l’avoir lors de la prochaine course. Je me suis dit : « T’es dans les temps, t’as fait ce qu’il fallait pour, ne remets pas tout en question à cause d’un résultat, t’es pas mauvais en plus (rires). »

Pour le public, il fallait se montrer satisfait…

Oui, mais ce n’était pas une image de façade. Oui, c’était une déception car j’allais aux Jeux pour gagner mais terminer sixième, ce n’est pas un mauvais résultat. J’en aurais rêvé étant petit et je savais qu’il restait des possibilités.

« J’ai encore faim »

Après les médailles, s’installe une nouvelle pression, celle de rejoindre Jean-Claude Killy, sacré trois fois à Grenoble en 1968…

Finalement, je le n’avais plus cette pression. On m’a beaucoup parlé de Jean-Claude Killy, de records, d’histoire mais j’étais avant tout focalisé sur ma performance, sur les moments qu’on vivait dans l’équipe. La troisième médaille a failli venir. Mais si je ne l’ai pas eue, ce n’est pas à cause de la pression.

Que reste-t-il de cette photo-finish et de cette médaille d’argent au terme de la mass-start ?

Il me reste de bonnes choses. Il faut remettre la course dans son contexte. J’étais tombé malade, avec une sinusite qui m’a beaucoup pénalisé. J’ai des problèmes avec ma carabine au premier tir, je fais une remontée incroyable jusqu’à la ligne d’arrivée où je jette le pied à peine trop tard. Il y a forcément une déception quand ça se joue à si peu mais j’avais quand même une belle médaille d’argent et il y avait encore des courses avec les relais qui arrivaient. Je n’étais pas frustré, d’autant plus que c’était mon meilleur adversaire qui l’obtenait (Emil Hegle Svendsen). C’était aussi un beau clin d’œil.

Qu’est-ce que cela a changé dans les mois qui ont suivi ?

Il y a eu beaucoup plus de sollicitations, de reconnaissance. Ça dure encore aujourd’hui, même si on est dans une société qui passe vite à autre chose. Il y a encore un bel effet olympique qui, j’espère, va durer jusqu’aux prochains Jeux.

Vous sentez-vous plus léger désormais ?

Oui, dans le sens où c’était un objectif de carrière. Ça m’aurait peiné de ne pas l’atteindre. Je me dis : « C’est à toi, on ne te le prendra jamais. » C’est rassurant même si ça ne m’empêche pas de continuer à faire des sacrifices importants pour aller en chercher d’autres. On a encore faim après ça, on a encore envie de plein de belles choses, de plein d’émotions et je suis prêt à aller les chercher. Finalement, c’est aussi magique que dans un rêve d’enfant. C’est même mieux que dans un rêve d’enfant. Quand on est gamin, on idéalise un athlète avec une médaille autour du cou. On voit la finalité mais on n’imagine pas le processus pour l’atteindre et je crois que c’est ça le plus important.

la rédaction