
"FIFAGate": La défense de Nasser Al-Khelaïfi conteste les "pots-de-vins"
Mercredi soir, Nasser Al-Khelaïfi, le président du PSG et de BeIn Media Group, devait un peu plus penser à la nouvelle soirée cauchemardesque de son équipe sur la pelouse du Santiago Bernarbeu plutôt qu’au procès en appel du "FIFAGate". Pourtant, un peu plus tôt dans cette journée de mercredi, ses avocats ont plaidé en faveur d’une relaxe de leur client.
Mardi, dans la journée, la procureure fédérale suisse, Cristina Castellote, avait requis une peine de vingt-huit mois de prison contre le dirigeant qatari pour un fait "d’instigation à gestion déloyale aggravée". Le président du PSG avait été acquitté dans cette affaire lors de son jugement en première instance, en octobre 2020.
Au cœur de cette affaire, une villa en Sardaigne. Les représentants de Nasser Al-Khelaïfi ont donc essayé de démontrer pendant plusieurs heures hier qu’il n’avait pas acquis en 2013, contre 5 millions d’euros, cette villa. Pour la justice suisse, le Français et ancien secrétaire de la FIFA, Jérôme Valcke, a eu l’usage "exclusif" de cette villa durant 18 mois. En contrepartie de cet usage, la FIFA aurait attribué lors de l’année 2014 les droits médiatiques des Coupes du monde 2026 et 2030 à BeIn Sports et à l’autre groupe qatari, Al-Jazira.
Nasser Al-Khelaïfi "conteste l’existence d’un pacte"
"Une autorité de poursuite pénale ne devrait jamais laisser naître en son sein les désirs de trophée, a dans un premier temps affirmé Maître Grégoire Mangeat, avocat du président parisien, en visant le ministère public de la Confédération (MPC). La justice pénale ne devrait jamais être une chasse." Avant de poursuivre son raisonnement: "Il n’est pas acceptable que l’autorité de poursuite pénale tente de salir Nasser Al-Khelaïfi en instillant le poison de la suspicion sur des pièces que le MPC a choisi de ne présenter qu’au moment de son réquisitoire devant les juges de première instance. Sans avoir jamais interrogé Nasser Al-Khelaïfi sur ces quelques pièces."
L’avocat du président parisien qui a plaidé pendant plus d’une heure et demie avoue qu’il "n’est pas acceptable" que "l’autorité de poursuite pénale semble contrariée par la présomption d’innocence" et "semble contrariée par la détermination intacte" de Nasser Al-Khelaïfi à plaider son innocence. Depuis le début de cette affaire, le patron du club de la capitale, via son la voix de son avocat, conteste "fermement l’existence d’un pacte ou d’un arrangement corruptif".
Si le Tribunal pénal fédéral de Bellinzone avait, en première instance, qualifié de "pot-de-vin" l'acompte versé à Jérôme Valcke, il ne pouvait pénalement condamner pour "corruption privée", la FIFA ayant retiré sa plainte en janvier 2020 après un accord avec M. Al-Khelaïfi, dont les termes n'ont jamais été rendus publics. "Les avantages qui, selon le MPC, auraient été octroyés par notre client à M. Valcke ne sont pas des pots-de-vin en raison de leur nature et en l’absence de réalisation des éléments constitutifs de l’infraction de corruption privée", a-t-il indiqué devant la justice.
La date du 24 octobre 2013 base de l'affaire
Pour l’avocat de Nasser Al-Khelaïfi, "Nous savons désormais que, le 3 octobre 2013 au plus tard, la sous-commission de rémunération de la FIFA avait adopté les montants maximums du bonus du directeur des droits TV de la FIFA, pour les deux cycles financiers 2023 à 2030. Ces montants maximums de bonus reposaient sur des "sales target", autrement dit sur des objectifs financiers, pays par pays, ou région par région." Dans ce dossier, l’avocat souhaite montrer que ces "éléments sont tout à fait essentiels" parce qu’ils "permettent de comprendre pourquoi les discussions pouvaient et s’étaient déjà engagées", avant le 24 octobre 2013. Pour le parquet, MM. Al-Khelaïfi et Valcke, auraient établi ce jour-là un "pacte corruptif", à Paris, avec l’acquisition de la fameuse Villa Bianca. Pour Maitre Mangeat, le 24 octobre 2013, "il n’y avait pas encore de chiffres sur la table" et d’insister "pourquoi M.Al-Khelaïfi aurait-il mis sur la table son désir d’obtenir un contrat qu’il obtiendrait de toute façon faute de concurrence? Quand vous êtes seuls sur un marché, votre force, c’est celle de pouvoir dicter les prix!"
Restait donc l'accusation de "gestion déloyale", qui nécessite de prouver que l'accord entre les deux hommes a lésé la Fifa. Or le contrat signé avec beIN était particulièrement favorable à l'instance du foot, prévoyant 480 millions de dollars pour deux Coupes du Monde - soit 60% de plus que pour les Mondiaux-2018 et 2022, alors que la chaîne était seule en lice, a encore rappelé la défense. Trente-cinq mois de prison ont été requis contre l’ex-numéro deux de la FIFA, acquitté en octobre 2020 pour "gestion déloyale aggravée". L’avocat de l’ex-secrétaire général de la FIFA, Me Patrick Hunziker a estimé que la charge du Ministère public de la Confédération (MPC) "était disproportionnée". Le jugement sera normalement annoncé dans le courant du mois d’avril. Et un "jugement motivé" devrait être rendu pendant l’été.