
Toulon: Lemaitre inquiet si la saison de Top 14 ne reprend pas en septembre
Bernard Lemaitre, la fin de saison a été actée, quelle est votre première réaction?
Finir la saison n’avait plus de sens puisque jusqu’à fin août, et compte tenu des conditions sanitaires à respecter, il n’était plus possible d’organiser des matchs autrement qu’à huis clos. Il y a eu une certaine unanimité, parmi les présidents, pour dire que le huis clos est désastreux pour le rugby. La saison s’arrête donc là. Si on avait pu jouer demi-finale et finale à partir de fin août, je n’y étais pas opposé, évidemment. Mais vu les risques encourus et l’incertitude qui va encore flotter jusqu’à fin juin minimum, il est absolument impossible de se projeter de cette façon-là.
Cette issue doit vous laisser un goût très amer…
Il y a forcément eu des regrets, instantanément. On avait encore trois matchs importants à Mayol, un autre au Vélodrome qui était porteur d’un gros projet pour une fête du rugby à Marseille. Nous devions récupérer l’intégralité de notre effectif, avec des joueurs de grande valeur, avec une certaine montée en puissance. Tout cela nourrissait de grands espoirs. Mais, c’est du passé! Le temps n’est plus aux regrets, il faut se projeter vers la saison prochaine.
"Les échanges entre présidents sont restés très courtois"
Quand allez-vous pouvoir rejouer au rugby, justement?
Je voudrais bien le savoir! On parle du mois de septembre… Est-ce que ce sera la première semaine? Les conditions seront-elles à ce moment-là bien différentes de ce qu’on aurait pu avoir à la fin du mois d’août? Personne ne peut le dire. Même la ministre, et on peut le comprendre, n’était pas en mesure de donner plus de précisions. C’est très embêtant de ne pas connaître la date de reprise car cela conditionne tout le programme de réathlétisation. Le planning d’entrainement se programme en rétro-planning, par rapport à la date du premier match de compétition. Donc tout le monde est dans le flou.
Aucun titre ne sera donc décerné cette saison…
Non, il n’y aura pas de champion de France. Le président Laurent Marti s’est clairement positionné en disant qu’il ne préférait pas être champion dans ces conditions. Il a eu une réaction de grande qualité. D’ailleurs, je n’ai jamais assisté à des débats houleux, les échanges ont été très courtois. Il y a des opinions parfois différentes, des questions sans réponses, mais c’est beaucoup plus consensuel (que dans d’autres sports, NDLR). Tout le monde est logé à la même enseigne, avec énormément d’incertitudes sur le plan sportif et une économie extrêmement fragile.
Une baisse de salaires? "Je n’ai pas à imposer des règles qui sortent du lien contractuel établi"
Quid des Coupes d’Europe, vous deviez jouer un quart de finale de Challenge à Mayol?
L’EPCR continue de faire valoir son souhait de faire jouer les la phases finales de Coupe d’Europe entre septembre et octobre. Il faudra trouver trois dates cet automne. Il y a une pression très forte de la part des pays anglo-saxons car cette compétition représente pour eux une source de revenus très importante. Il est probable que la coupe d’Europe ailler à son terme, c‘est la tendance.
Concernant d’éventuelles baisses de salaires, vous avez affirmé ne rien vouloir imposer aux joueurs. Maintenez-vous cette position?
Je confirme cette prise de position. Elle est valable pour tous les joueurs, le staff et le personnel. Je crois qu’il y a une tendance tout à fait positive qui se dessine mais qui vient spontanément de la part des joueurs et du groupe en général. Oui, je crois savoir que mon attitude a effectivement dû être appréciée, j’ai certains retours timides qui me le montrent. Mais cela fait partie de mon éthique personnelle. A partir du moment où j’ai ce club en main, je n’ai pas à imposer des règles qui sortent du lien contractuel établi. S’il y a une initiative qui devait se dessiner, avec à la clé une baisse des salaires, elle doit venir des joueurs, avec une compréhension de la situation et de cette période extrêmement difficile pour le rugby en général.
Cette crise sanitaire représente quel manque à gagner pour le RCT?
Pour le club, le préjudice sera d’environ 8 à 9 millions d’euros, ce qui est considérable pour une période aussi courte, pendant laquelle il y aura effectivement zéro recette. Ensuite, tout dépendra de la date de reprise de la compétition. Si on reprend courant septembre, on peut réamorcer la pompe avec nos supporters, nos partenaires, nos annonceurs, qui pour le moment nous maintiennent globalement leur confiance. Donc, si la saison reprend normalement, on pourrait faire une saison 2020/2021 à peu près à l’équilibre.
"Ne pas reprendre avant la fin de l’année serait dramatique pour le rugby"
La saison pourrait reprendre plus tard qu’en septembre?
Oui, il y a une autre hypothèse, tout à fait crédible, et qui a été évoqué ce matin avec la ministre: c’est qu’on ne reprenne pas avant la fin de l’année! Ce serait assez dramatique. Pas seulement pour le RCT mais aussi pour d’autres clubs plus fragiles. Il faudrait alors envisager un plan de sauvegarde du rugby professionnel. Il y aurait différentes façons de venir au secours de notre sport, pas seulement en injectant de l’argent. Les charges sociales et patronales pèsent par exemple beaucoup sur les salaires, cela fait partie des gestes qui pourraient être faits par l’État pour nous faciliter la vie après la crise. La Ligue est en train de monter un dossier qui sera très bientôt remis au ministère des Sports.
Cette première saison en tant que président est assez mouvementée…
C’est un peu cahoteux, il faut bien l’avouer (sourire)… Mais nous travaillons énormément pour présenter, la saison prochaine, la meilleure équipe possible. Je suis venu au RCT pour vivre des émotions sportives, et cette période ne va pas me décourager.