
Stade toulousain: "Je suis prêt à raccrocher les crampons", annonce Jérôme Kaino
Comment allez-vous? On vous a laissé blessé face à Castres au début du mois de novembre, allez-vous faire votre retour?
Oui. Je reprends l’entraînement collectif avec l’équipe cette semaine. Ma cheville va bien. Ça a été un long processus de guérison et de rééducation. Mais ça va mieux. J’espère être capable d’être disponible pour jouer contre Bordeaux dimanche.
Vivez-vous vos dernières semaines de rugbyman professionnel? Allez-vous prendre votre retraite à la fin de la saison?
Oui. A cent pour cent, c’est ma dernière année de joueur. Tous les joueurs qui prennent leur retraite ont l’habitude de le dire: vous savez quand c’est le moment. Quand vous savez, vous savez. Je sens que je ne vais pas rajeunir même si je prends toujours du plaisir en jouant au rugby. Mais je pense que de nouveaux joueurs arrivent et notamment une nouvelle génération tournée vers l’avenir. Je suis prêt à raccrocher les crampons.
Est-ce que cela devient difficile pour vous de vous entraîner, les matchs, les chocs?
Non, je me sens bien. Que ce soit pour les matchs ou les entraînements. Je peux suivre. Mais je pense que plus tu avances, plus tu as des blessures un peu dans la saison. Pour moi, c’est juste une histoire de pouvoir maintenir un haut niveau de jeu pendant si longtemps. Et en étant réaliste, peut-être que je peux pousser cette saison, mais ce sera dur d’essayer de garder un haut niveau une année de plus. Il est temps de laisser la place aux autres.
C’est une décision difficile à prendre?
Oui, toujours. Mais je suis content quand je fais le bilan de tous les endroits où j’ai été. Maintenant je dois juste apprécier le rugby lors des six ou sept prochains mois. Profiter de ce voyage et quand il sera temps de raccrocher, je serai prêt.
Quel regard portez-vous sur votre riche carrière?
Je suis très fier. Quand je me retourne, les nombreux souvenirs, les nombreux amis. La grande réussite bien sûr, c’est la Coupe du monde, mais je suis encore plus fier de m’être fait de grands amis tout au long de ma carrière. C’est une grande expérience, comme d’avoir visité des pays incroyables. Il y a beaucoup de choses qui me reviennent.
"J’adorerais entraîner"
Et s’il y avait un moment à choisir? Le plus intense?
Un des matchs les plus intense a été la finale de la Coupe du monde 2011 face à la France. Ça a été un match compliqué. Le plus compliqué et intense qu’il m’ait été donné de jouer. Etre à domicile, avoir la pression sur nous, mais aussi la façon de jouer des Français… c’était très intense. Tout pouvait arriver dans ce match. Une vraie réussite pour moi.
Estimez-vous heureux d’avoir fait partie de cette génération des doubles champions du monde All Blacks?
Oui, sans aucun doute. N’importe que joueur de rugby aimerait avoir la chance de jouer deux finales de Coupe du monde. Quelle chance. Y arriver et les gagner, c’est spécial. Je me considère absolument chanceux.
Est-ce que vous estimez également avoir été proche de la perfection lors de la Coupe du monde que vous remportez en Angleterre en 2015?
Oui, je pense. En 2015 on a juste joué sans aucune pression. Car il y en avait beaucoup sur les joueurs quatre ans auparavant. Etre en Nouvelle-Zélande, être capable d’être bons pour Gagner la Coupe du monde, avec les quatre années précédentes qui pesaient sur nous, c’était très difficile. Mais en 2015, on est venu, on a réussi à se mettre au niveau et on savait qu’on était capables d’aller chercher le titre. Je n’emploierais pas le terme de perfection, mais c’était super, oui.
Allez-vous rester en France la saison prochaine? Avez-vous le souhait d’entraîner?
J’adorerais. J’adorerais entraîner. Je me suis toujours dit que le rugby m’a tant donné, tant d’opportunités, de réaliser des rêves, voyager dans le monde, que quand je finirai, je voudrai travailler pour le futur des jeunes joueurs. Leur donner l’opportunité de vivre ce que j’ai vécu. Donc j’aimerai travailler avec le Stade Toulousain, pour le futur de ce jeu. Pour les joueurs qui débutent, la nouvelle génération, leur transmettre ma passion et mon savoir, tout ce que j’ai appris.
Vous en discutez avec le Stade Toulousain?
Oui, on en parle. Evidemment c’est une période difficile en ce moment avec l’épidémie, mais je leur ai fait part de mon intérêt pour ça. On en a parlé avec Ugo (Mola) et Didier (Lacroix). Je serais très content de travailler avec eux. Car le club a été incroyable pour moi et ma famille et j’adore ma vie en France. Donc si je peux rester quelques années à apprendre le Français, j’aimerais rester (sourire).
"Marchand et Baille auraient leur place dans n’importe quelle sélection"
Qu’avez-vous appris en France, à Toulouse?
Oh, tant de choses. J’ai appris que vous devez vous adaptez à différents styles. En Nouvelle Zélande, beaucoup de joueurs jouent de la même façon, dans un même système. Mais en France, vous avez beaucoup de joueurs qui jouent dans des styles différents. On a Cheslin Kolbe, Antoine Dupont, Romain Ntamack… ces joueurs sont très instinctifs et si vous jouez avec eux vous devez réagir très rapidement pour que le jeu continue. Donc moi, je dois être sûr que mon instinct est similaire à eux pour réagir à chaque chose qu’ils font sur le terrain. Et je pense que c’est une façon géniale de jouer. C’est dur de défendre contre eux, parce que eux peuvent t’analyser mais toi, si tu ne sais pas ce qu’ils vont faire tu ne peux pas les arrêter. J’ai aimé apprendre ça.
Et des avants vous ont surpris?
Oui! Des "big boys" qui sont très adroits! J’en cite quelques-uns mais Julien Marchand ou Cyril Baille auraient leur place dans n’importe quelle équipe du Super Rugby ou n’importe quelle sélection avec leur niveau de jeu et leur adresse. Ils sont très mobiles pour leurs mensurations. Ils sont capables d’être n’importe où sur le terrain et de faire n’importe quel geste. J’ai vraiment aimé joué avec eux.
Quel est votre souhait pour les prochains mois?
Mon souhait c’est que l’épidémie de Covid-19 se termine et que les supporters puissent revenir au stade pour qu’on joue devant eux. Mais j’aimerai aussi être en haut du classement de la Champions Cup et du Top 14 pour espérer réaliser nos rêves.