
FFR: "Il faut arrêter de diviser les gens", lance Florian Grill avant les élections fédérales
Une campagne passionnante mais éreintante
"L’expérience humaine a été folle, assure Florian Grill. C’était épuisant mais nous avons vécu des moments exceptionnels. Quand je vais sur le terrain, je sais pourquoi je me bats. Et on sait exactement ce qu’il faut qu’on fasse. Au total, on aura fait 230 réunions, avec un audit jamais vu sur le rugby français. Celui-là existe… Sur le climat de la campagne, un président de Fédération ne devrait pas tenir ce genre de propos avec des attaques. Quand on est président de la FFR, on se doit de respecter l’institution et les gens qui ont fait l’histoire de ce sport. Je ne veux pas tomber dans ce sujet-là. Je voulais débattre comme vous le savez. Je voulais échanger en face à face, parler du contenu, éviter les attaques dans le dos et privilégier les échanges en face à face sur le programme et les contenus. C’est évidemment un regret qu’il n’y ait pas eu de débat avec Bernard Laporte, cela ne nous a pas empêchés de débattre avec les clubs. Les équipes qui s’énervent sur le terrain sont généralement celles qui sont en difficulté. Nous, nous sommes sereins, alignés avec ce que l’on pense depuis le début. Dans nos calculs, on pense qu’il y a vraiment match et on a ce qu’il faut pour aller au bout. Je ne réfléchis pas par rapport aux petites phrases de Bernard Laporte, aussi agressives soient-elles."
En juin 2019, Bernard Laporte lançait "Florian Grill, personne ne le connaît si ce n'est sa mère donc on s'en fout"…
"Ce propos était très irrespectueux. Au rugby, la première des choses que l’on apprend, c’est le respect. C’était assez mal venu sachant en plus que je suis président de la Ligue Île-de-France. J’étais a minima connu par les présidents de cette ligue en étant élu avec 66% des voix. Je ne veux pas entrer dans ce jeu des petites phrases. Probablement que ma notoriété est plus grande aujourd’hui. Mais la vraie question n’est pas celle de la notoriété, mais bien celle de la compétence. Le rugby a besoin de gens qui travaillent et qui connaissent le rugby du quotidien. Moi, cela fait 40 ans que je suis dans le rugby territorial et régional. C’est aussi un travail d’équipe, nous sommes 38 sur la liste. Certains d’entre eux ont de la notoriété, et beaucoup connaissent le rugby du quotidien."
Quelle différence entre les deux candidats?
"La vraie connaissance du terrain. On a deux visions et deux styles de management opposés. La vision de Bernard Laporte est un rugby que l’on construit par le haut avec une Coupe du monde annuelle des clubs, qui à mon sens met en danger la sécurité des pratiquants, l’argent dont on nous dit qu’il va dégouliner sans avoir de modèle pérenne pour justement amener de l’argent dans le rugby. On ne fait que vider les caisses ou vendre une partie du patrimoine pour financer. Nous, on a un vrai modèle où l’on reconstruit le rugby par la base en affirmant le rôle éducatif et citoyen qui est le nôtre, mais aussi en travaillant le scolaire, la formation, avec un vrai objectif de fidélisation des licenciés. C’est vrai que Bernard Laporte a aussi fait des déplacements sur le terrain, mais la question n’est pas juste d’aller voir les gens, c’est de les écouter. De notre côté, nous n’avons pas une écoute politique."
Apaiser le rugby français
"Nous devrons lancer un audit financier et RH. On entend parler de beaucoup de tensions au sein même des équipes de la Fédération Française. Il faut s’assurer que les gens travaillent dans des conditions apaisées et acceptables. D’une manière générale, il faudra cicatriser le rugby qui est trop à feu et à sang à notre sens. On a besoin de calmer le jeu, il faut arrêter d’opposer et diviser les gens. (…) Nous ne serons jamais champions du monde en 2023 s’il n’y a pas une entente positive entre la Ligue et la Fédération. Dès que Bernard Laporte et Serge Simon sont arrivés à tête de la Fédération, ils ont demandé la tête de Paul Goze et Emmanuel Eschalier (ndlr: président et directeur général de la LNR). Désormais, on en est arrivé à des papiers juridiques entre les deux instances. C’est catastrophique pour le rugby. Il y a urgence à apaiser et cicatriser tout ça."
Des finances en danger ?
"Le 3 juillet, la Fédération a fait voter un budget pour la saison 2020-2021 avec 5,4 millions d'euros de déficit. A l’époque, j’avais levé le bras pour dire que ce budget était a minima déraisonnable, ou alors ce n’était qu’une hypothèse haute car vous prévoyiez un France-Irlande à 80.000 places et des jauges à 55.000 pour l’ensemble des matchs de l’automne. Deux mois après, le château de carte s’écroule. On a fait croire aux clubs que les arbres montaient jusqu’au ciel, malheureusement ce n’est pas le cas. Nous sommes confrontés à une vraie problématique budgétaire et la Fédération a bien été obligée de reconnaître qu’il y aurait au moins 8 millions de déficit supplémentaires, donc 14 millions de déficit pour la saison 2020-2021. C’est dramatique de ne pas avoir anticipé. Diriger c’est prévoir et la FFR, du moins sa gouvernance, a, pour le moins, été inconséquente. (…) Nous venons de faire un Grand Chelem déficitaire... Il faut évidemment regarder les résultats des comptes d’exploitation, pas les résultats exceptionnels, et ils sont limpides: 6,4 millions de déficit la première année, 1,5 million la deuxième, 3,4 millions la troisième, et donc 5,4 millions la quatrième qui deviendront 14 millions… Une somme de déficits met la FFR en difficulté. Je suis extrêmement inquiet sur les finances de la Fédération. Mon engagement est que nous arriverons à gérer raisonnablement la Fédération sans que cela n’ait d’impact sur le fonctionnement quotidien des clubs."
Le staff des Bleus conforté
"J’ai été très convaincu par le projet de Raphaël Ibanez et de Fabien Galthié quand ils l’ont présenté au comité directeur de la Fédération. Il y a clairement eu une amélioration depuis leur arrivée, mais aussi peut-être depuis que Bernard Laporte et Serge Simon ont arrêté de vouloir porter le costume du sélectionneur en même temps que le sélectionneur. C’est ce qu’ils avaient fait à l’époque de Guy Novès avec une gestion humaine calamiteuse et un audit qui n’existait pas. Je considère que l’équipe de France doit être au-dessus de toute considération politique. On n’aura pas d’états d’âme à travailler avec Fabien Galthié. Notre approche n’est certainement pas de faire la chasse aux sorcières. Je ne travaille pas avec les gens parce que ce sont mes amis, mais parce qu’ils sont compétents. Je n’ai pas de problèmes sur le sujet de la compétence, Jean-Marc Lhermet non plus, s’agissant de Raphaël Ibanez et de Fabien Galthié. Ils seront toujours là si nous sommes élus, il n’y a aucun problème là-dessus."
Un entourage encombrant ?
"Je voudrais mettre les points sur les 'i': qui est-ce qu’on attaque? Serge Blanco? Est-ce que l’on s’arrête 30 secondes sur la carrière de Serge Blanco et ce qu’il représente dans le rugby mondial? C’est une chance phénoménale d’avoir quelqu’un qui a sa notoriété. Si je ne le prenais pas dans mes équipes, je ferais une faute. Il va travailler sur les partenariats. Peut-être que BMW n’aurait pas quitté la Fédération si elle avait eu quelqu’un de la dimension humaine de Serge Blanco pour gérer les interactions. Il va travailler sur l’international où sa personne est écoutée. Il fait peut-être partie des cinq personnes les plus connues dans le monde des dirigeants du rugby. Jean-Claude Skrela, dont Bernard Laporte a dit pis que pendre, a remporté deux Grands Chelems comme sélectionneur, et joué une finale de Coupe du monde. J’ai entendu qu’on voulait comparer les carrières sportives mais en tant que sélectionneur il n’y a pas photo. Il va travailler sur le développement de la culture du VII dans les clubs. Il a fait quasiment toutes les 230 réunions avec nous et il a vu les clubs du quotidien. Il n’y a aucun doute sur sa compétence du projet olympique qui est un véritable enjeu. Ma responsabilité n’est pas de faire du 'dégagisme' mais de positionner les gens aux bons endroits. On compose des équipes avec des anciens et des nouveaux comme au rugby. La moyenne d’âge est de 53 ans, ce qui est du jamais vu, avec 90% de nouveaux dans ma liste. Je suis agacé car quand on s’attaque aux gens, on est très loin du contenu et des programmes. Encore une fois, un président de Fédération n’a pas le droit de faire mal aux gens du rugby, car cela fait mal rugby."