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Champions Cup: l'étrange préparation du Stade Toulousain pour sa demi-finale

Dix ans après son quatrième dernier sacre, le Stade Toulousain a l’occasion à nouveau de se qualifier pour une finale européenne. Mais sa demi-finale à Exeter, ce samedi (16h30), s’est préparée de manière incroyable, entre peur de la contagion et planning du coup très allégé pour un tel évènement.

Dès dimanche, à la sortie du quart de finale victorieux du Stade Toulousain face à l’Ulster en Champions Cup, le manager Ugo Mola, loin de l’euphorie, surprenait presque l’assistance en avouant sa crainte des jours à venir. "J’espère surtout qu’on aura l’occasion d’y aller " disait-il en évoquant la potentielle demi-finale à Exeter, qui n’avait pas encore battu Northampton. Il faut dire que la veille, l’élimination sur tapis vert du voisin castrais en quarts de finale de Challenge Cup, pour cause de cas de Covid dans l’effectif, avait trouvé une grande résonnance au sein des voisins toulousains. "On nous oppose souvent mais je suis quand même navré qu’une équipe française n’ait pas pu jouer son quart de finale de Challenge", confiait Mola. Il était alors dit que cette semaine ne serait pas ordinaire du côté d’Ernest-Wallon. Mais alors pas du tout…

Le staff a donc profité de la récupération nécessaire les jours suivant pour maintenir les joueurs chez eux. Ainsi, les Toulousains ne se sont pas retrouvés avant mercredi, pour une répétition… avec des masques et en marchant ! Il y a bien eu un peu de physique ce jour-là, mais en binôme seulement. Le tout entre deux sessions de tests de dépistage, bien sûr. En fait, le groupe a vécu son premier véritable entraînement collectif jeudi, soit à 48 heures du match. Un aspect assez incroyable quand vous préparez un tel rendez-vous. "On n’a pas pris le risque, poursuit Mola. L’entraînement en marchant et avec les maques, c’était pour se mettre les idées au clair sur ce qu’on voulait mettre en place. On a vraiment pris ce parti de ne pas exposer le groupe à un risque sanitaire, de manière à perdre sur tapis vert car ce serait la pire des choses. Même si ce n’est pas la meilleure des préparations, même si ce n’est pas l’idéal pour jouer une demi-finale de Champions Cup."

Sans parler du fait qu’elle se joue à l’automne, après seulement deux journées de Top 14 pour se roder. Voilà donc une phase finale européenne vécue de manière surprenante. Et ce n’est pas fini. Car au contraire du Racing, qui a la joie de recevoir les Saracens, le Stade Toulousain va se confronter à un très règlementé voyage de l’autre côté de la Manche. Bienvenue en Angleterre. "Les règles sanitaires nous contingentent à l’hôtel ce vendredi, explique le manager toulousain. J’espère au moins que nous aurons la possibilité d’aller voir le stade vendredi soir avec nos buteurs, pour qu’ils aient eux l’occasion de taper aux poteaux d’Exeter. Histoire aussi de prendre l’air."

"Sur l’étoile, il n’y aura pas marqué Covid-19"

Le séjour sur place n’aura pas du tout le goût de "La croisière s’amuse". Mais plutôt de "la délégation est pistée". Ambiance suspicion… "Nous allons devoir rester à l’hôtel vendredi et samedi, ajoute Mola. Avec un parcours très précis, des prises de températures… Je vous passe les détails car c’est le parcours du combattant. On essaye de ne pas mettre trop de stress chez les joueurs sur tous ces détails. Pour que lorsqu’on arrive, tout soit carré, cadré. Qu’on n’ait pas d’énergie à laisser sur tous les à-côtés et qu’on se concentre totalement sur notre performance."

Pas évident. Comment vit-on cela quand on est joueur ? Dort-on dans le garage de sa maison avec livraison de repas sur un plateau ? Ça fait sourire Yoann Huget, qui réfute. "Tout le monde a peur. Mais si on respecte nos gestes barrières, si on est prévoyant, je pense qu’on n’a pas besoin de se mettre dans une grotte comme je l’ai entendu ou dans un garage. On est dans une période compliqué, tout peut arriver. On peut maîtriser nos gestes barrières. Après, on essaye juste d’être au maximum de la vigilance". Ce qui ennuie le plus l’ailier international, c’est finalement le contexte anxiogène dans cette période potentiellement festive. "Malgré tout, on essaye de préparer cette demi-finale. Parce qu’on parle plus de Covid que de demi-finale ! Alors qu’on a un challenge énorme devant nous".

Désolé Yoann, c’est la période qui veut ça. Comment ne pas remarquer que le cheminement vers ce rendez-vous du dernier carré européen se fait en catimini ? Sans les tapes sur l’épaule des supporters venus en nombre aux entraînement, sans les caméras et micros tendus pour faire monter la sauce. Une fadeur qu’il faut appréhender. "Il y a un travail en amont à faire qui est tout aussi important que celui sur le terrain. C’est sûr que d’être au repos lundi et mardi, de ne pas ressentir cette pression et cette effervescence monter au fur et à mesure de la semaine, de jouer dans un stade vide, de se déplacer en comité restreint, c’est comme si on galvaudait cette demi-finale. Il faut faire abstraction de tout ça, se concentrer sur le match. Car pour le vainqueur de la Coupe d’Europe, sur l’étoile, il n’y aura pas marqué Covid 19." Car au bout, même masqué, il y a un vrai titre à aller chercher.

Wilfried Templier