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Philippe Auclair 14/09

Ah, le beau week-end...36 buts de marqués, dont quelques chefs d’oeuvre (Jermain Defoe, Wayne Rooney: merci, messieurs!), des matchs pleins de rebondissements (j’étais hier à Fulham-Everton: a priori, rien de bien alléchant, si ce n’est le simple plaisir d’être au merveilleux Craven Cottage; mais quel cran de l’équipe de Hodgson, qu’on croyait morte et enterrée!), bref, la saison, ladies et gentlemen, commence bien, très bien, mieux que quelque autre depuis...pfff, très longtemps, trop longtemps.

Mis à part, of course, un détail: le comportement imbécile d’Adebayor à Eastlands. Adebayor qui, en 90 minutes, a joué trois rôles. Attaquant.Provocateur.Voyou.

Prenons cela dans l’ordre.

L’attaquant est, quand il a le coeur à l’ouvrage, ce qui fut rarement au cours des 14 derniers mois, un monstre. Transféré à City alors que, contrat signé, il essayait encore de faire de convaincre Manchester United et Chelsea de l’acheter (comme l’a révélé Sir Alex Ferguson), il a retrouvé le coffre et l’eficacité de sa 2ème saison à Arsenal. 4 buts en 4 matchs, dont deux décisifs, c’est le rendement d’un footballeur de très haut niveau. Il en fera souffrir d’autre que Manuel Almunia cette saison, et pour peu que Mark Hughes sache gérer sa collection de prima donnas, City ira peut-être plus loin que quiconque pouvait l’espérer – ou le craindre, moi-même compris.

Le provocateur? Non content de se fendre de commentaires douteux sur sa relation avec les supporters de son ancien club, il a trouvé le moyen de traverser la longueur du City of Manchester Stadium pour aller narguer – insulter – ceux d’entre eux qui avaient fait le déplacement depuis Londres. Même Usain Bolt aurait eu le temps de se dire, ‘attends, du calme, tu es en train de faire n’importe quoi, tournes casaque!’. Adbayor, lui, a continué de sprinter, risquant de provoquer une émeute dans les tribunes. Ce n’est pas que de l’inconsience. Son geste était délibéré, calculé pour faire exploser la fureur de fans dégoûtés de son comportement lorsque, à la fin de la saison 2007-08, il avait flirté ouvertement avec Barcelone et Milan, multipliant les déclarations de fidélité une minute, et les appels du pied à ses prétendants la suivante.

Le voyou? C’est une agression sur son ex-capitaine Cesc Fabregas dès le début du match, qui méritait une sanction plus sévère qu’un avertissement. Suivie d’une autre. Suivie, à la 72ème minute, de l’inexcusable labourage du visage de Robin van Persie à coups de crampons. Le Néerlandais n’est pas exactement un soldat de l’Armée du salut lui-même, c’est d’accord: son ‘tacle’ sur le Togolais, quelques instants plus tôt, aurait dû être sanctionné. Mais Adebayor ne peut être disculpé du geste le plus vil de cette saison, qui aurait pu coûter un oeil à van Persie. La FA bûche sur les deux dossiers,heureusement. Si le bras d’honneur fait aux supporters des Gunners pourrait n’être jugé par sa commission disciplinaire que dans quelques semaines, l’attentat sur RvP sera quant à lui l’objet d’une procédure accélérée, qui n’augure rien de bon pour le striker de Man City: 2 matchs de suspension minimum, probablement 3, voire davantage. Mes contacts à la fédération me disent tous que la punition pourrait être ‘exemplaire’ (comprendre: ‘très sévère’) et ‘rapide’ – suffisamment pour que la sanction soit appliquée avant le 152ème derby de Manchester, dimanche prochain. C’est un coup dur pour Mark Hughes, d’autant plus difficile à avaler que Carlos Tevez (blessé avec la sélection argentine) ne sera probalement pas rétabli pour jouer contre son ancien club. Avec Robinho (fracture de la cheville) et Santa Cruz toujours ‘out’, ce sont des Citizens très affaiblis qui feront le court déplacement à Old Trafford.

La faute à qui?

(Un dernier mot. J’entends souvent parler des ‘durs’ du football, avec comme une pointe de regret. Vous savez, ‘le foot est aussi un sport physique, les joueurs ne sont pas des danseuses, ça n’était pas comme ça de mon temps, etc., etc.’. Ce discours me dégoûte. C’est quoi, un dur? Vinnie Jones, Goicoechea, Domenech ‘Le Boucher’, Neil Ruddock, ‘Chopper’ Harris (liste ouverte, hélas): le point commun entre tous ces destructeurs tant admirés est, quand on y réfléchit, la lâcheté. Roy Keane, son assassinat de Alf-Inge Haaland, un geste d’un dur, ‘d’un homme, un vrai’? Non. L’inverse. La violence d’un couard.

Non que je dirais nécessairement la même chose si j’étais face-à-face avec l’ancien boxeur de Cork...)