
Laure Manaudou: "Pour moi, il reste le petit Flo"
Laure, que ressentez-vous après cette troisième médaille d’or de Florent ?
Enormément d’émotion. J’étais assez stressée toute la journée. Il était très fatigué et je ne savais pas comment il allait aborder le fait d’avoir à côté de lui Nathan Adrian, qui avait nagé plus vite que lui en demi-finales. C’était vraiment une belle course, qui m’a donné les larmes. Maintenant, il a tous les titres, il est content. Il va pouvoir se reposer un peu et repartir à fond pour la prochaine saison.
Repensez-vous à lui enfant ?
Pour moi, il reste le petit Flo. Quand je dis, ça tout le monde rigole parce qu’il fait deux mètres et cent kilos. Les images que j’ai dans la tête, c’est quand il était plus petit que moi et qu’il me suivait dans les compétitions. C’est émouvant de le voir parmi les meilleurs nageurs du monde maintenant. C’est génial qu’il soit là. Ce n’est pas un Manaudou pour rien. Quand on plonge dans l’eau, on a envie de gagner. Faire le deuxième temps des demi-finales l’a boosté. Sans ça, je ne pense qu’il aurait fait 21’’19 (temps le plus rapide de l’histoire sans combinaison, ndlr).
Etait-ce dur de regarder cette course de votre cabine commentatrice ?
C’était très dur de voir ça de loin. J’ai vu qu’il me regardait parce que c’est important pour lui que sa sœur soit là, comme notre père, et que sa famille soit fière de lui. Il nage aussi pour ça : nous montrer qu’on est n’est pas venu pour rien. On va débarquer en masse à Rio, comme ça il ira encore plus vite.
Vous impressionne-t-il encore ?
Oui parce que je l’ai eu par messages interposés hier et je ne pensais pas qu’il ferait un temps aussi exceptionnel. J’avais peur qu’il finisse deuxième. Je me disais que je n’allais pas pouvoir le voir après parce qu’il allait être énervé. Le fait de le voir comme ça et de se libérer comme ça, c’était magique et c’est un moment qui restera longtemps dans ma mémoire. Il reste le petit Flo mais il fait partie des grands maintenant.
Il a désormais plus de médailles d’or que vous aux Mondiaux…
(Sourire) Je m’attendais à ce qu’on m’en parle. C’est vrai qu’on nous compare souvent. Moi je n’ai pas eu la chance d’avoir une médaille mondiale en petit bassin. C’était le but de Flo, avoir cette médaille pour me passer devant. Et tant mieux s’il me passe devant et continue d’avancer parce qu’un titre olympique sera en jeu l’année prochaine. Il montre aux jeunes qu’on peut y arriver en étant le « frère de » et dans l’ombre au début. Maintenant, il s’est fait un prénom. Il vit des moments magiques et je suis contente de les vivre avec lui.
« Il me fait beaucoup de bien »
Il semble beaucoup mieux assumer son statut de leader aujourd’hui…
Il le vit très bien. C’était compliqué lors des Mondiaux de Barcelone (en 2013) après sa médaille d’or à Londres. Il l’a très mal vécu. Là, il est arrivé décontracté parce qu’il savait qu’il s’était bien entraîné. Sur le 50, il était vraiment au-dessus de tout le monde, même si on n’est jamais à l’abri d’une erreur. Ça promet une belle saison prochaine et un beau titre.
Quel a été son secret pour se remotiver alors qu’il a touché le bonheur olympique très tôt ?
Je pense que c’est d’avoir des amis qui ne sont pas du tout dans la natation et lui parlent d’autre chose. C’est aussi d’avoir d’autres centres d’intérêt et de ne pas vivre uniquement pour la natation. Il s’est mis à la guitare il n’y a pas longtemps. Il apprend tout seul et comme il n’est pas patient, il donne tout pour y arriver quand il se met à quelque chose. Je pense que d’ici quatre ans, il sera en concert (rires). Il n’a pas peur d’être ridicule, il essaie. Il me fait beaucoup de bien là-dessus parce que je me préoccupais beaucoup du regard des gens, pour essayer de leur plaire. Flo, il s’en fout. Il est naturel, quitte à jurer à l’arrivée du 50m.