Bernard: "Manaudou a peur d’être moins performant sur 50m"

Vainqueur du RMC Sport Award du sportif de l’année 2015, Florent Manaudou aura un grand défi face à lui en 2016 avec les JO de Rio. Le champion olympique de Londres hésite d’ailleurs à doubler le 100m et le 50m, distance sur laquelle il défendra son titre. Invité du Super Moscato Show ce vendredi sur RMC dans le cadre des RMC Sport Games, Alain Bernard, médaillé d’or sur 100m aux JO 2008, explique pourquoi ce choix est crucial avant d’aborder Rio.

Alain Bernard, pensez-vous que Florent Manaudou doit tenter le doublé 50-100m aux JO à Rio ?

Il y a une composante importante qu’il ne faut pas oublier : le 50m est après le 100m dans le programme olympique. Le programme des Jeux a toujours été établi comme ça. Florent a beaucoup plus de repères sur le 50m que sur le 100m, qui demande beaucoup d’investissement pour avoir des repères sur des championnats intermédiaires. Jusque-là, il est quand même champion d’Europe (à Berlin en 2014, ndlr) et il n’a pas volé cette place. Il n’y a pas participé cet été aux championnats du monde à Kazan. Je pense qu’il a peur d’être moins performant sur le 50m, alors qu’il peut jouer le doublé. Florent le dit, il y a quelque chose de fort à jouer : conserver un titre olympique sur une même épreuve, ce qui n’a été fait par personne en France. Je pense que c’est ce qui le fait kiffer aujourd’hui.

Pourquoi aborde-t-on différemment un 50m et un 100m ?

Il ne faut pas se leurrer. Travailler un 100m est très différent que travailler un 50m. En athlétisme, l’équivalent est un 400m. Demandez à un athlète d’aller préparer un 400m ou un 200m, ce n’est pas du tout la même chose. En natation, c’est pareil. Une course de 21 secondes n’est pas du tout la même chose qu’une course de 47 secondes.

Ne pensez-vous pas qu’un titre sur 50m serait un peu moins « exceptionnel » que sur 100m ?

On dit que le 100m est la course reine et on parle beaucoup de cette distance. Il y a un retentissement énorme en 2008 quand je suis champion olympique du 100m (à Pékin, ndlr). Mais en 2012, Yannick est champion olympique du 200m nage libre et il est pris à sa juste valeur. Florent gagne le 50m et a eu une aura extraordinaire aussi. Je pense qu’on est au-delà du parfum formidable du 100m nage libre parce que ce sont des Français, parce qu’ils gagnent et qu’on est fier d’eux quand ils le font.

Florent Manaudou prendra sa décision après les championnats de France, qualificatifs pour les Jeux...

Il sera trop tard. Les critères de sélections sont hyper exigeants. C’est 48’’1 pour se qualifier sur le 100m. Il faut avoir de gros clients. Jérémy Stravius a nagé en 48’’3 il y a trois semaines, alors qu’il n’était pas préparé. Un garçon comme Mehdy Metella peut surprendre tout le monde et venir les coiffer. Florent peut arriver troisième de la finale, alors que ce sont les deux premiers qui sont qualifiés. Il faut voir plus loin, c’est un vrai projet olympique. En 2012, Florent ne s’attendait pas forcément à faire les Jeux. Il s’est qualifié pour un centième de seconde et grâce à ce centième de seconde, il était champion olympique quelques mois après. Il a eu une progression fulgurante qui va à l’encontre de tous les principes qu’on essaye d’appliquer depuis des années.

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