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Jeux olympiques de Tokyo: inquiétude et résignation face à l’éventualité d’un huis clos

Moins de 300 jours avant l’ouverture des Jeux Olympiques 2021 à Tokyo, les questions sont nombreuses sur l’organisation de l’événement en pleine crise sanitaire. La première, est-ce que du public sera présent dans les tribunes ? De plus en plus de sportifs s’inquiètent de vivre une compétition à huis clos.

L’ombre du huis clos plane sur les Jeux olympiques de Tokyo. Organisés du 23 juillet au 8 août 2021, l’un des plus grands événements sportifs du monde pourrait se dérouler à huis clos. Début juillet, lors d’une conférence de presse, Thomas Bach, président du CIO, avait complètement écarté cette idée: "L'organisation des Jeuxolympiques à huis clos est clairement quelque chose dont nous ne voulons pas."

Il y a une semaine, le président du Comité international olympique est revenu sur son idée dans une interview à la chaîne de télévision sud-coréenne SBS et a estimé qu’avoir des stades remplis ne serait "peut-être pas possible". Cette hypothèse prend de l’ampleur et de plus en plus d’athlètes commencent à entendre cette mélodie dans les couloirs de leurs fédérations. Face à cette situation, RMC Sport est parti à la rencontre des athlètes français déjà qualifiés pour les Jeux olympiques.

Des sportifs résignés

Dans le clan tricolore, l’idée du huis clos n’est pas perçue de la même manière. Certains semblent résignés. "Je trouve ça assez triste, lâche Mathilde Gros, pistarde française qualifiée pour Tokyo 2020. Ce qui nous pousse, nous les athlètes, c’est le public. Je suis très famille, elle devait venir me voir à Tokyo. Sans ma famille et le public, ça fait un peu peur."

Comme la pistarde française, Jenia Grebennikov, libero de l’équipe de France de volley, n’arrive pas à se faire à cette idée de gradins vides pendant la compétition. "C’est vrai que c’est difficile de jouer dans une salle vide, on dirait un match amical. Le public te donne une adrénaline, une agressivité en plus. Ça te permet de performer encore plus. Lors d’un match avec l’équipe de France par exemple, même en Bulgarie avec le public contre nous, ça te porte, c’est beau. Ça serait triste."

D’autres semblent déjà accepter cette idée. "Avoir des Jeux olympiques à huis clos, pour moi, ça ne devrait pas changer grand chose. Actuellement, on teste à Pau, une Coupe du monde à huis clos, confie Martin Thomas, céiste français qui a décroché son premier billet pour des Jeux Olympiques de Tokyo 2020. L’enjeu sportif reste le même du moment que les athlètes sont concentrés sur ce qu’ils ont à faire et sur leur performance."

Dans le canoë-kayak lors de la descente, le public est plus éloigné des sportifs, ce qui peut expliquer le sentiment différent des athlètes sur la présence de spectateurs, totale, partielle voire nulle. Le marathonien français Hassan Chahdi va réaliser ses premiers JO. Pour lui, la compétition est trop prestigieuse: "Le public aide à la motivation, ça permet de s’impliquer dans la course. Mais pour moi, les Jeux suffisent à eux-mêmes pour le côté motivation. Si c’est mieux un huis clos pour tout le monde, on fera avec."

Objectif, éviter l’annulation des Jeux

Même si l’idée est présente dans un coin de la tête, l’annulation des prochains Jeux Olympiques n’est pas concevable pour le clan français. "Les sportifs entendent cette rumeur depuis le report des premiers, indique Martin Thomas. Aujourd’hui, le CIO doit prendre des décisions en fonction de l’évolution de la situation sanitaire. On verra ce que l’instance va dire dans les prochains mois. Le sport doit s’articuler autour de la situation sanitaire. Je ne pense pas que c’est en annulant les compétitions sportives que l’on pourra aller de l’avant."

Sur la même longueur d’onde, Mathilde Gros poursuit: "A l’heure actuelle, il faut s’adapter et improviser. En fait, j’ai l’impression que l’on ne voit pas plus loin que deux semaines. C’est une année difficile, on verra dans les prochains mois comment la situation évolue." Une annulation de la compétition pourrait avoir des conséquences sur les athlètes en fin de carrière. "Je me dis que je suis jeune. Dans le pire des cas, je pourrais rebondir dans quatre ans. Je pense surtout aux plus anciens", termine la Française.

De son côté, le Japon étudie l’ensemble des organisations possibles, même celle d’accueillir du public dans les enceintes sportives pendant la compétition. Depuis quelques semaines, le gouvernement japonais, en concertation avec l’organisation de Tokyo 2020, réalise plusieurs tests. Comme par exemple, relever la jauge des spectateurs sur des rencontres dans le Stadium de Yokohama, terrain utilisé pour des compétitions dans le cadre des Jeux olympiques.

En attendant des avancées sur le dossier des spectateurs, l’organisation a annoncé fin octobre les modalités de remboursement pour les détenteurs de tickets qui ne pourraient se rendre aux épreuves reportées à l’été 2021 en raison du Covid-19. Près de 4,5 millions de billets ont été vendus pour les Jeux olympiques et près d'un million pour les Jeux paralympiques.

Nicolas Pelletier et Morgan Maury