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France-Qatar : cinq questions pour une finale

Thierry Omeyer, Cédric Sorhaindo, Daniel Narcisse et Xavier Barachet

Thierry Omeyer, Cédric Sorhaindo, Daniel Narcisse et Xavier Barachet - AFP

Rêvée pour le pays hôte, surprenante pour les observateurs, la finale du Mondial entre le Qatar et la France ne va pas manquer de sel, ce dimanche, au Multipurpose Hall de Lusail (17h15). Ni d’enjeux pour les Experts, qui pourraient marquer leur sport une fois pour toutes. A condition de gérer, entre autres, un statut de favori et un arbitrage pointé du doigt ces derniers jours.

Un succès pour écrire (seuls) l’Histoire

Si les Bleus remportent le Mondial qatari dimanche, ils pourront directement inscrire leurs noms au marqueur sur le livre d’or du handball international. Ou les graver dans la roche. Car une victoire au Multipurpose Hall de Lusail propulserait directement les hommes de Claude Onesta dans une autre dimension, qu’eux seuls seraient, pendant un (long ?) moment, amenés à maitriser. Un succès sur le Qatar et la France deviendrait la première nation du handball à avoir décroché cinq Mondiaux dans son histoire.

Elle s’offrirait aussi le luxe, pour la deuxième fois, d’avoir trusté les uns après les autres tous les titres majeurs internationaux (JO 2012, Euro 2014 et donc Mondial 2015). « En ligne de mire, il y a le cinquième titre mondial, que jamais personne n’a eu, et la qualification directe pour les Jeux Olympiques de Rio, insiste l’ancien sélectionneur tricolore Daniel Costantini. On notera quand même que les cinq titres seront acquis entre 1995 et 2015 alors que les quatre titres des Roumains et des Suédois, c’est sur une période beaucoup plus longue. Pour les Français, c’est une hégémonie qui se confirmerait. »

Gagner chez le pays hôte, les Bleus savent faire

La Croatie en 2009 et le Danemark en 2013. Deux finales face au pays organisateur, la première lors d’un Mondial, la seconde lors d’un Euro. Et deux victoires pour les Experts de Claude Onesta, auxquelles on pourrait rajouter le succès en demi-finale face à la Suède, en 2011 à Malmö. On l’aura compris, les Bleus ne craignent pas de frustrer leur hôte lors des grandes compétitions internationales. Mais cela ne leur donne pas, pour autant le droit, ni l’envie, de considérer cette habitude comme un avantage certain.

« Claude Onesta va leur rappeler qu’on a beau être favoris, ça reste une finale en terre étrangère, et il faudra prendre les précautions d’usage. Mais franchement, il ne va pas y avoir besoin d’être géniaux, assure Costantini. Et je sais que les Français, vu que c’est une finale, on va les voir sous leur meilleur jour. Je sais que Guigou va faire des choses exceptionnelles. Je sais que Narcisse, qu’on a retrouvé en partie en demie, va confirmer. Et Karabatic, avec son orgueil démesuré, sera là aussi.»

Y aura-t-il vraiment match avec Omeyer, Karabatic et Narcisse à leur meilleur niveau ?

Justement. Jusque-là plus passeur que buteur dans ce Mondial, Nikola Karabatic a fait pleuvoir la foudre sur l’Espagne. Idem pour Daniel Narcisse. Sans compter que dans son but et sur sa ligne, Thierry Omeyer se transforme, match après match, en un véritable épouvantail. Le Qatar, aussi pourvu soit-il en talents individuels, peut-il faire chuter des Experts à ce niveau-là ? « Si le Qatar n’est pas à 150 % de ses moyens, on n’a rien à craindre. Même à 100%, on n’a rien à craindre, estime Costantini. Nous, on a une super défense, et le Qatar n’en a pas encore rencontrée. L’assurance tout risque de la France, c’est sa défense et son gardien. Franchement, c’est la première fois qu’avant une finale je me dis qu’on va la gagner sans être obligés d’être à 200%. »

Gagné d’avance ?

L’Allemagne et la Pologne. Si ces deux nations n’avaient pas le niveau ni l’aura de la France, l’Espagne ou le Danemark, elles n’en restaient pas moins supérieures, sur le papier, à des Qatariens totalement novices en phases finales. Et à chaque fois, elles ont mordu la poussière. Alors, même si la France est ultra favorite de cette finale, doit-elle considérer ce match comme quasi-gagné avant le coup d’envoi ?

« Le Qatar est une équipe à laquelle il faut prêter attention. Ils ont une efficacité offensive certaine, avec des joueurs surprenants, qui ne se ressemblent pas tous, souligne Costantini. Mais franchement, sur ce qu’on vu en demi-finales, je ne vois pas comment les Français pourraient laisser échapper ce match. D’autant que je pense que les Qataris sont tellement contents d’être arrivés là qu’à un moment donné, ils vont peut-être accepter l’idée que le titre de champion du monde ne sera pas forcément pour eux. »

Une idée que ne partage pas Michaël Guigou, qui s’attend à devoir cravacher dimanche. « On avait déjà affronté le Qatar l’an passé à Bercy et le match avait été accroché (victoire des Bleus 29-23). On avait gagné dans les dernières minutes. Depuis, cette équipe a recruté d’autres joueurs. Elle est maintenant très complète. »

Arbitrage maison dimanche ?

C’est LA principale question, finalement, autour de cette finale. Celle qui revient dans la bouche des détracteurs du Mondial qatarien, qui ne cessent de rappeler que les supporters ont été « achetés » (invités en « all inclusive » pour supporter les nations participantes, dont le Qatar) et que la quasi-totalité de l’équipe a été naturalisée. Des interrogations en feu nourri depuis le succès du pays hôte sur la Pologne et sur les critiques émises par cette dernière à l’encontre de l’arbitrage. « Les Qataris ont été devant tout le long. On ne peut pas dire que leur victoire est un hold-up, assure Daniel Costantini. De toute façon, l’arbitrage est très subjectif en handball. » Mais souvent favorable, pour certains observateurs, aux Qatariens.

Michaël Guigou ne cache pas son appréhension. Mais l’ailier gauche tricolore refuse de se focaliser là-dessus. « Il ne faut surtout pas penser à l’arbitrage, assure-t-il. On doit justement rester sur ce que nous, nous pouvons contrôler. On nous parle souvent du match en Allemagne en 2007, où on se fait voler par l’arbitre qui avait sifflé quelque chose contre nous (défaite 32-31 en demi-finale, ndlr). Mais au final, on était capable avant de gagner ce match. Alors concentrons-nous sur ce qu’on va être capable de faire sportivement. »

la rédaction