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Rennes: Stéphan conseille à Camavinga de rester la saison prochaine

Dans un entretien accordé à RMC Sport, Julien Stéphan exprime sa "volonté" de conserver Eduardo Camavinga au Stade Rennais pour la saison 2020-2021. Bien qu'il n'ait "pas de certitudes" sur l'avenir de son jeune milieu de terrain, l'entraîneur de 39 ans estime néanmoins qu'une poursuite de l'aventure bretonne est sa meilleure option.

Comment organisez-vous la reprise?

On a fait un rétroplanning par rapport à la date de reprise potentielle de la Ligue 1, le 22 ou 23 août. On reprendra certainement notre préparation estivale le lundi 22 juin, avec une semaine de test inhérents à un début de saison. À partir du 29 juin, nous débuterons nos huit semaines de préparation pour nous amener au début de la compétition. Nous sommes en train de voir si on peut avoir les autorisations nécessaires pour pouvoir travailler en petits groupes pendant les trois semaines qui vont arriver. Si on a l'autorisation, on pourrait retrouver les joueurs en respectant un protocole bien défini. Ensuite, il sera temps pour les joueurs de couper trois semaines pour se ressourcer, notamment psychologiquement. 

Que pensez-vous de la reprise qui se profile en Allemagne?

Je pense que c'est très compliqué de comparer les situations d'un pays à un autre. Nous, l’option qui a été prise l’a été après la consultation, j'imagine, des plus éminents spécialistes. Le pour et le contre a été posé et il semblerait que la meilleure solution était un arrêt. Pour ce qui se passe en Allemagne, c'est compliqué de juger. Si eux ont pu créer les conditions pour une reprise du championnat, tant mieux. On aurait nous aussi tous souhaité que le verdict soit celui du terrain. Mais la condition sine qua non était que la santé de tous soit préservée. Ce qui n'était pas le cas en France. Donc, selon moi, c'est la décision la plus sage qui a été prise.

Il ne doit pas y avoir de retour en arrière comme le laisse entendre Jean-Michel Aulas?

Je n'ai pas les éléments suffisants pour pouvoir m'exprimer. Il y a des organes compétents, des personnes spécialistes de ces problématiques. Si elles ont estimé qu'on ne pouvait pas reprendre le championnat, c'est qu'elles avaient suffisamment d'éléments pour prendre cette décision. Le gouvernement s’est positionné, il fait foi dans ces décisions. Donc on respecte ce qu’on nous demande de faire. Pendant deux mois, j'entendais et j’écoutais tout ce qu’il se disait. Je crois qu’on a beaucoup appris pendant cette période, sur la maladie et ses spécificités. Ça a forcément eu un impact sur les décisions qui ont été prises. Je comprends aussi parfaitement les problématiques des présidents et des dirigeants, avec les difficultés économiques que ça peut engendrer. Pour autant, la priorité était de préserver la santé de tout le monde. Je peux seulement observer qu'au fil des jours il y avait des connaissances plus approfondies sur la maladie et que les décisions étaient prises en conséquence.

C'est triste de ne pas avoir pu fêter cette troisième place avec le groupe?

C'est particulier, mais on vit une situation tellement inédite qu'on est obligé de s'adapter. On aurait tous préféré une décision de terrain et c'est une décision administrative, selon moi, de bon sens. On a fêté notre troisième place, la meilleure dans l'histoire du club, avec un petit verre à la main, en partageant ça avec le staff. On a aussi appelé les joueurs pour se féliciter. Les féliciter pour la qualité de leur saison et leur dire que ce n'était pas volé, mais mérité au regard des trois quarts de championnat effectué.

Quel goût à cette saison avec des hauts et des bas pour le coach?

Une saison linéaire, c'est extrêmement rare. On a bouleversé notre effectif à l'intersaison dernière en perdant notamment 60% des joueurs qui avaient gagné la Coupe de France. Il nous a fallu du temps pour nous remettre en route avec un mercato à très tardif. Et puis on a trouvé notre vitesse de croisière à partir du mois de novembre. On s'est installés sur le podium à la trêve et on ne l'a plus lâché jusqu'à la mi-mars. C'est qu'on a su faire preuve de régularité à partir du mois de novembre. Et ça a payé.

L’objectif est de ne pas retomber dans le même écueil que l’an passé lors de cette intersaison?

Complètement. Il faudra à la fois qu'on soit capable de garder notre noyau dur qui a fonctionné cette année, progresser ensemble, et qu'on soit en capacité d'apporter quelques retouches pour continuer à faire grandir l'effectif et avancer le club. Le programme sera très chargé la saison prochaine, avec des matchs qui vont s'enchaîner de façon très régulière et des rencontres tous les trois jours. Il nous faudra donc la densité et la qualité pour pouvoir tenir toute une saison à ce rythme-là. Il ne faut pas qu’on se retrouve à nouveau avec un effectif chamboulé à 50 ou 60%. On sait que ça demande du temps pour retrouver des automatismes. Ça demande aussi du temps d'avoir des résultats, donc il faut s'appuyer sur ce qui a bien fonctionné. On peut aussi améliorer cet effectif avec quelques retouches qui vont apporter de la densité, car la concurrence est forte. On a réussi cette année à terminer devant Monaco ou Lyon, des équipes qui sont dimensionnées pour normalement être à la place où on a fini. La concurrence sera encore très rude, la saison prochaine. 

Tout ça avec le budget d’un club pour l’Europa League?

Pour l'instant nous sommes qualifiés pour le Q3 (tour préliminaire de Ligue des champions, ndlr). Si les coupes d'Europe vont au bout et que le vainqueur de la Ligue Europa est déjà qualifié pour la Ligue des Champions via son championnat, alors dans ce cas on basculera directement dans la phase de poules. Mais tant que ce n'est pas le cas, on est qualifié pour le Q3 avec, j'imagine, un budget en conséquence qui sera plutôt programmé pour la Ligue Europa. Si jamais on arrive à se sortir de ce double barrage, ce qui ne sera pas une mince affaire, il y aura peut-être des ajustements à faire en fin de mercato. Il y a encore beaucoup d’inconnu et on navigue un peu à vue. Il a fallu s'adapter pendant les deux mois passés. Au regard de la situation, il va encore falloir le faire pendant les semaines et les mois qui arrivent. 

Est-ce que l’actionnaire pourrait donner un coup de pouce financier si vous étiez en phase de poule de Ligue des champions?

Ce n'est pas le genre de discussion que l'on a avec l'actionnaire. Je ne me mets pas sur le même plan que l'actionnaire, qui est là depuis 20 ans. Les tauliers, c'est la famille Pinault. C'est leur club, ce sont eux les boss. On prend de nos nouvelles régulièrement, pour savoir si tout va bien, et on s'est surtout donné pour mission de rendre du bonheur aux gens. Nos supporters sont privés de foot et on sait à quel point, depuis maintenant deux ans, ils nous suivent et nous supportent. Ils ont joué un rôle prépondérant dans nos résultats. La situation que l'on vit aujourd'hui est un drame sanitaire qui va avoir des répercussions très fortes sur le plan économique et donc sur le quotidien des gens. On devra, quand on pourra retourner sur les terrains et offrir du spectacle, faire tout pour leur offrir un maximum de plaisir.

Vous préférez jouer la carte de la prudence?

Pour le moment, on est qualifié pour le Q3. On ne peut pas faire rêver. Il faut apprécier le classement qui est historique, le plus beau dans l'histoire du club. Ça, il faut le savourer et l'apprécier. Et puis l'étape de demain, c'est prendre le temps de bien la préparer et voir où ça nous mènera par la suite. Il faut qu'on soit fier du parcours qu'on a fait avec la victoire en Coupe de France la saison dernière et cette troisième place cette année. Il faut avoir de l'ambition, mais rester très humble et faire attention. Il faut maintenir de l'ambition, car on souhaite à nouveau être dans le haut du classement. On a vu que gagner un titre était très difficile, mais possible puisqu’on l’a fait. Il faut aussi qu'on fasse preuve d'humilité, qu'on ne se prenne pas pour ce qu’on est pas. Il y a des clubs qui ont des moyens bien supérieurs aux nôtres. Il faut ne pas se tromper, travailler différemment et essayer de faire mieux que la concurrence.

Dans le noyau dur que vous souhaitez pour votre effectif, est-ce qu'il y aura Eduardo Camavinga?

Je n'ai pas de certitude. Mais avec la saison que nous avons vécue, une troisième qualification consécutive en coupe d'Europe, un classement historique et la nécessité pour lui de confirmer la saison prochaine... ça me semble être toutes les conditions nécessaires pour qu'il puisse poursuivre au moins une année supplémentaire chez nous. Eduardo s'est très rapidement adapté au projet collectif en début de saison. Il a réalisé des performances qui lui ont permis de prendre une place importante dans notre milieu de terrain, à différents postes et dans différents systèmes. Il y a donc la volonté de le conserver, pour maintenir une ambition avec une concurrence qui sera rude et sûrement très revancharde la saison prochaine. Maintenant, je n'ai pas d'assurance sur ce qu'il va se passer. Je sais qu'il se plaît à Rennes, qu’il est bien dans le groupe, qu'il est bien dans l'équipe et qu'il est très attaché au club. Je souhaite bien évidemment poursuivre avec lui. Au-delà du souhait, je me permets même un conseil: "Tu as ici le club qui te permettra de continuer à avancer, à t'épanouir, certainement pour être dans les meilleures conditions possibles pour confirmer avant de pouvoir voir autre chose". Sportivement, ça me semble très intéressant pour lui de poursuivre une année de plus au Stade Rennais.

C’est un garçon qu’on n’entend pas beaucoup...

Il est très jeune. Il a 17 ans et une nature réservée. Il est très respectueux. Il faut un peu le protéger. Pas le cacher, mais il y a beaucoup de choses qui se passent autour de lui. Heureusement, il a la tête très bien faite. Il est aussi très bien entouré, c'est rassurant, mais protégeons-le encore un petit peu.

Vous allez travailler avec Florian Maurice. Vous vous connaissez depuis longtemps?

Je l’ai connu quand il était joueur à Lyon, un avant-centre avec une qualité de déplacement et très adroit devant le but. C’était vraiment un très bon joueur. Il n’y a pas de confirmation encore aujourd’hui. C’est le dossier du président, il communiquera en temps et en heure. Mais on a la volonté de travailler à trois, avec un président et un directeur sportif dans l’avenir.

Ça serait une bonne recrue venue d’un club de niveau Ligue des champions...

Il a beaucoup d’expérience. Il est intelligent. Il est fidèle et loyal. Il a beaucoup de compétences et, s’il devait nous rejoindre, ça serait extrêmement bénéfique pour le club.

Pierre-Yves Leroux