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OM: Rolando, le "match spécial" face au PSG, "l’ami" André et le "phénomène" Kamara

Le défenseur de Braga revient sur ses quatre saisons à l’OM mené, depuis, par son ex-entraîneur, André Villas-Boas.

Pourquoi avez-vous quitté l’OM en fin de saison dernière?

A la fin de ma troisième année, j’étais en fin de contrat et mon cycle à l’OM était pratiquement arrivé à son terme. Le club m’avait parlé d’une possible prolongation mais ma tête était déjà tournée vers une aventure ailleurs, dans un autre pays. J’avais des négociations bien avancées et je me suis blessé. Frank McCourt m’a alors dit: "Ne t’inquiète pas. Tu es en fin de contrat mais tu peux considérer que tu es un joueur de l’OM pour un an de plus. Parce que tu as toujours été là quand on a eu besoin de toi. Récupère tranquillement et, quand tu seras prêt, tu nous aideras à nouveau." Je suis revenu en un temps record. J’ai tout donné. Et, à la fin de cette saison, je suis parti. Le club connaissait de nombreux changements et j’ai senti que j’avais besoin d’autre chose. Bon... Le hasard a fait qu’un mois après mon départ, alors que j’avais dit au revoir à tout le monde, André Villas-Boas est arrivé...

>> Où en est Rolando? Retrouvez la première partie de son interview

AVB a été votre entraîneur au FC Porto en 2010-2011. Vous êtes même le joueur qu’il a le plus utilisé cette saison-là (au cours de laquelle les Dragons remportent notamment la C3)...

Avec lui, les choses auraient peut-être été différentes...

Villas-Boas ne vous a pas appelé au moment de rejoindre l’OM, histoire de vous retenir?

Disons qu’on s’est retrouvés, aussi bien lui que moi, dans une situation un peu inconfortable. Depuis Porto, je vois avant tout André comme un ami. Au moment de signer à l’OM, il m’a appelé. D’entrée je lui ai dit: "Mister, avant qu’on commence à parler, pour ne pas que ce soit bizarre, sachez que j’ai adoré Marseille, j’y ai connu des moments difficiles mais aussi de très bons. Ce furent quatre années intenses, gravées à jamais en moi. Mais, maintenant, je veux autre chose. Si vous avez besoin de quoi que ce soit, je suis là." Je voulais que les choses soient claires, pas malaisantes.

Il n’a pas essayé de vous faire revenir?

Il me connait. Il sait que quand je décide quelque chose...

L’OM d’AVB a atteint la deuxième place. Beaucoup ont été surpris...

(Il coupe) Ca a peut-être été une surprise pour beaucoup de gens en France mais pas pour moi. Parce que connais les joueurs, leur qualité, et qu’avec de la confiance, avec un entraîneur qui arrive à les faire se sentir importants, c’était possible. Et là-dessus, André est incroyable. J’ai parlé avec certains joueurs de l’OM durant la saison et je leur ai dit: "Si vous adhérez à ses idées, que vous donnez tout pour lui, il vous emmènera tout là-haut." Ils me disaient: "On aime l’entraîneur et on aime sa personnalité!" Parce qu’il est direct, frontal, il dit les choses en face. Avec lui, il n’y a pas d’excuse. Il sait lire les adversaires comme peu le savent, il prépare très bien les matchs. Quand il a annoncé qu’il allait lutter pour le podium, j’ai vu certaines critiques. Et le résultat est là. J’en suis triplement satisfait: pour le club, mes ex-coéquipiers et pour André et son staff.

Vous disiez que Villas-Boas est très frontal. Les rapports avec le président Jacques-Henri Eyraud ont été un tendus dernièrement. Vous qui les connaissez bien, comment analysez-vous la situation? Sont-ils si différents que cela?

Ils sont différents. Mais il arrive que les opposés s’attirent, sauf si c’est à l’extrême. Je pense qu’ils ont un objectif commun: mettre l’OM là-haut et ils s’accordent pour tenter d’y arriver. Connaissant André, il n’ira pas en Ligue des champions pour faire de la figuration. Il a utilisé peu de joueurs cette saison et celle qui arrive risque de compliquer les choses. Il y aura plus de matchs, le niveau va être plus élevé, et il lui faudra un effectif pour y faire face.

Que pensez-vous de la décision de Villas-Boas de rester à l’OM la saison prochaine?

S’il a décidé de rester, c’est qu’il a ses raisons, probablement des garanties, aussi en ce qui concerne l’effectif. Je suis heureux de voir qu’il reste parce qu’il est mon ami et qu’il va continuer d’entraîner certains de mes ex-coéquipiers dont certains sont eux aussi mes amis, au sein d’un club qui m’a marqué et qui est un club spécial. A Marseille, il y a une passion très prononcée pour l’OM et André aime ce genre de défi. J’en profite d’ailleurs pour le féliciter pour son excellent travail et je lui, je leur souhaite que la saison prochaine soit tout aussi réussie.

Quel est votre meilleur souvenir de vos quatre ans passés à l’OM?

Ce serait facile de dire mon but qui nous a emmené en finale d’Europa League [le 3 mai 2018, face au Red Bull Salzbourg, à la 116e]. Ce fut un moment spécial, le club attendait une finale européenne depuis longtemps. Mais je suis défenseur, alors élire un but comme mon meilleur souvenir... (Rires) J’ai vécu un autre moment très spécial lorsque j’étais en marge de l’équipe première et que Rudi Garcia est arrivé. Il a misé sur moi dès son arrivée, face au PSG au Parc des Princes (0-0). J’ai reçu le trophée d’homme du match. Ce fut très marquant pour moi, c’est à partir de là que les gens ont commencé à me regarder d’un autre œil. Ce fut virage pour moi, à l’OM.

Comment définiriez-vous Rudi Garcia, en tant qu’entraîneur?

C’est un entraîneur qui aime être proche de ses joueurs. Il donne beaucoup de liberté aux cadres de l’équipe qui sont son prolongement dans le vestiaire et sur le terrain. Comme je faisais partie de ceux qui avaient un certain vécu, il me donnait cette liberté de m’exprimer. Il donnait beaucoup de valeur à cela. J’ai aimé travailler avec lui. Il m’a fait confiance. Lorsqu’il m’a aligné titulaire, pour son premier match, à Paris, il a été critiqué. On a vécu des moments fantastiques avec lui, lorsqu’on a atteint cette finale d’Europa League, par exemple. Mais en allant à Lyon, un rival de l’OM, il a un peu compliqué les choses... (rires)

Ça vous a surpris de le voir s’engager avec l’OL?

Disons que je ne m’attendais pas à ce qu’il parte à Lyon juste après avoir quitté l’OM. C’est toujours compliqué lorsqu’un joueur ou un entraîneur passe directement d’un rival à un autre. S’il y a une étape entre-temps, certains le comprennent un peu mieux. Mais je ne suis pas surpris qu’il accepte une offre de Lyon, parce que c’est un professionnel, qu’il était libre, que Lyon est un bon club, européen, ambitieux. C’est facile de juger, mais il a ses raisons. Je n’ai rien contre ça. Quand je fais mes choix, je les assume. Chacun mène sa vie comme il l’entend.

Vous avez aussi été dirigé par des Jesus, Jesualdo... Quel entraîneur vous a le plus marqué?

C’est difficile de répondre à ça. Je serais injuste d’en élire un. Il n’y a pas qu’un entraîneur qui m’a marqué. Tout dépend de quelle phase on parle. Mon premier match en pro [au Belenenses] était avec Carlos Carvalhal et il garde une place spéciale dans mon cœur, parce que si je suis devenu pro c’est en partie grâce à lui. Avec Jesus, j’ai appris ce qu’est le jeu, parce que mon football était brut, vierge. Il disait: "D’autres jouent au ballon, avec moi, vous allez apprendre à jouer au football." Jesualdo, au FC Porto, prenait beaucoup de temps pour m’inculquer des petits détails. André est celui avec qui j’ai gardé la relation la plus spéciale. On a maintenu une profonde amitié. Le dernier aurait dû être Rúben Amorim [le Sporting a levé son option d’achat, 10 millions d’euros, peu après l’arrivée de Rolando à Braga] mais il est parti ! (Rires) Il sera un ami pour la vie.

Quel regard portez-vous sur le jeune Bouba Kamara?

Ce gamin est un phénomène. Quand il a commencé à s’entraîner avec nous, il avait 15 ans. Et dès le premier jour, j’ai dit: "Non mais ce petit, là, va être un grand joueur." Il est le genre de défenseur central que j’aime. Il est bourré de qualités et, surtout, il travaille, il écoute. Il est hors norme. Je lui ai déjà dit: "Dans quelques années, tu m’inviteras pour aller voir tes matches en équipe de France et je pourrai dire que j’ai joué avec toi quand tu avais 15 ans." J’en suis sûr et certain. Il est très bon, en plus d’être une bonne personne. C’est mon petit.

Propos recueillis par Nicolas Vilas