
Riolo : « Où vont les Bleus ? »

Daniel Riolo - RMC Sport
En regardant l’équipe de France lors de ses dernières sorties, il m’est arrivé de me retourner sur le fameux France/Ukraine de l’automne 2013. La fête nationale, la joie et mon papier quelques jours plus tôt. Celui qui disait que ça ne serait pas plus mal de ne pas aller au Brésil. Le crime total. Le traitre à la nation. Je parlais de révolution dans notre foot, comme souvent depuis 2008… Bref de trucs finalement impossibles à faire. La pensée sur le long terme, une refonte globale de tout, c’est vague et ça se heurte aux impératifs du moment, au business. Aller à la Coupe du Monde, faire un quart de finale, quoi de mieux ? Le business est relancé, l’engouement aussi. Avec l’Euro 2016 à venir, c’était exactement ce qu’il fallait. Alors ma refonte (je ne dirai plus révolution)… poubelle.
Reste qu’on peut quand même regarder tout ça d’un peu plus près. Deschamps a d’abord remis de l’ordre, puis beaucoup communiqué. Il s’est appuyé sur une image d’intouchable. Le barrage aurait pu le flinguer, il en est ressorti en héros. Le quart au mondial l’a renforcé. A mes yeux, vous le savez, la France n’a réussi qu’un seul match là-bas, face à la Suisse. Une soirée où tout avait tourné dans le bon sens. L’idée au sortir de ce Mondial était que les Bleus avait désormais un super état d’esprit et que tout était au vert pour l’Euro.
Le jeu, personne n’en a parlé. Et un an plus tard, il n’y a toujours pas d’idée directrice dans ce domaine. Pire, l’état d’esprit (toujours le minimum quand on parle de sport) fait à nouveau défaut. Deschamps s’est mis en colère, une fois, puis deux. On a perdu contre le Brésil que la plupart des observateurs avaient qualifié d’équipe de tocards, puis contre la Belgique, qui paraît-il n’a pas de défense, puis enfin contre l’Albanie parce que… pas grave, un an avant la Coupe du Monde, la tournée Amsud avait été moisie et pourtant… On a compris, il y a toujours un moyen de se rassurer.
A un an de notre Euro, le chantier paraît toutefois problématique. Défense, milieu, attaque, tout est flou. Avec qui et comment ? La question est sans réponse pour l’instant. La mode dans notre foot, c’est de croire que ce sont les jeunes qui vont nous sauver. Les Lyonnais, Ntep… On perd en lucidité. On brillera vraiment à l’Euro avec des joueurs issus de notre L1 ? Là, on ne parle plus de lucidité, mais d’aveuglement. Quelqu’un pense sérieusement que notre championnat peut servir de référence ? Et même si on devait se tourner vers cette solution, il faudra quand même, à un moment, trouver comment faire jouer l’équipe. Or avec Deschamps de ce côté-là, c’est très confus. 433 ? Avec qui ? 4231, avec qui sur les côtés ? On fait un gros bloc et on attend un dribble de Fékir ou une accélération du nouveau héros Ntep ? Je me marre rien qu’en imaginant que quelqu’un puisse croire pareilles fariboles…
Miser sur nos joueurs évoluant à l’étranger reste plus acceptable. Il faudra que Griezmann soit moins perdu. Lui, le foot en mode bloc, esprit français, il ne connaît pas. Il faudra que Pogba se pose dans son nouveau club et digère son statut de star mondiale que le montant de son transfert risque de lui conférer. Il faudra qu’on trouve des milieux capables de jouer au ballon, ensemble !! J’ai vu samedi des Albanais plus propres dans l’utilisation du ballon, dans le jeu en mouvement. Il faudra que Varane justifie l’idée qu’il est incontournable. Il faudra aussi que Benzema soit le leader qu’il n’a jamais été en Bleu…
Il faudra donc beaucoup de choses. Et ça fait longtemps, très longtemps que la situation est figée. Et si d’un point de vue de la com' et de l’image, les choses ont pu évoluer, pour ce qui est du jeu et des joueurs, depuis 2006, rien n’a changé !