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eSport: l'Overwatch League ou quand l'eSport s'attaque avec ambition au sport traditionnel

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La semaine dernière se sont déroulés les premiers matches de l'Overwatch League, l'ambitieuse compétition esportive créé par le géant américain Blizzard sur le jeu de tir à la première personne qu'il édite lui-même, Overwatch. Ambitieuse, oui, en termes de retombées économiques, d'engouement et de modèle, puisqu'elle reprend les codes du sport traditionnel.

Des équipes représentant des villes

On va même être plus précis. Il s'agit des codes des sports américains et leur système de franchises qui fait toute la particularité de l'Overwatch League. Contrairement aux autres structures engagées d'ordinaire dans une compétition esport, les douze équipes qui disputent l'OWL ne sont pas le fruit de l'investissement d'une marque (télécom, télévision ou autres), d'un sponsor ou d'une équipe professionnelle déjà existante (comme le PSG sur FIFA). Chacune d'entre elles représente une ville bien distincte et a vu son nom associé à celle-ci : Boston Uprising, Dallas Fuel, Florida Mayhem, Houston Outlaws, London Spitfire, Los Angeles Gladiators, Los Angeles Valiant, New York Excelsior, Philadelphia Fusion, San Francisco Shock, Seoul Dynasty et Shanghai Dragons. Une ville sud-coréenne, une autre en Chine, une autre encore en Europe (Royaume-Uni) et les neuf autres aux Etats-Unis, cette première édition de l'Overwatch League a un fort accent américain. Trop? On y reviendra.

Des propriétaires aussi issus du sport traditionnel

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C'est la grande force de cet ambitieux projet esportif. S'il y a bien parmi les propriétaires des douze franchises des acteurs majeurs de l'eSport (Team Envy, Cloud 9, OpTic Gaming, champion du monde en titre sur Call of Duty, Immortals, Misfits, dont l'équipe League of Legends compte dans ses rangs le Français Steven "Hans Sama" Liv), on retrouve aussi des personnalités du monde du sport. C'est ainsi qu'on y voit les noms de Stan et Josh Kroenke, propriétaires des Rams de Los Angeles, d'Arsenal mais aussi désormais des Gladiators, l'une des deux franchises de la ville de L.A. sur cette Overwatch League, ainsi que le propriétaire des New England Patriots, Robert Kraft, dont le groupe détient la formation Uprising de Boston, ou encore celui de Jeff Wilpon, le patron des New York Mets (New York Excelsior). Avec de tels noms sur le papier, voilà qui donne encore plus de poids à la tendance de plus en plus marquée (et marquante) de rapprochement entre le sport traditionnel et l'eSport.

Un accord de diffusion très juteux

Business is business. Pour s'offrir une des 12 franchises de cette Overwatch League première du nom, il a fallu allonger quelques billets. Pardon, un bon paquet de billets. Car les chiffres évoqués ici et là font état de plusieurs millions de dollars, 20 notamment, comme le rapportait ESPN en septembre dernier, lors des dernières négociations entre Blizzard et certains candidats. C'est le prix qu'aurait déboursé le groupe Comcast Spectacor, propriétaire des Philadelphia Flyers (NHL), pour s'offrir la franchise de la même ville. C'est le même montant qu'aurait accepté de verser Stan et Josh Kroenke pour décrocher un des deux slots reversés à la ville de Los Angeles. Si Blizzard a empoché un joli pactole avec l'achat de ces franchises, il en a aussi touché un autre avec les droits de diffusion de la compétition. Pour 90 millions de dollars - chiffre rapporté par le site Sports Business Daily - la plateforme de diffusion web Twitch s'est payé la diffusion des deux premières saisons de l'Overwatch League en exclusivité, des matches de saison régulière aux playoffs. Avec plusieurs canaux de diffusion : anglais, coréen et français.

Une appli mobile et un calendrier déjà fourni

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Pour garantir un succès optimum à cette Overwatch League et séduire un plus large public, Blizzard a mis au point une application mobile officielle. Un peu comme ce qui se fait en NBA ou en NFL, celle-ci permet à ses utilisateurs de connaitre le profil des 12 équipes franchisées, mais aussi et surtout de suivre les résultats et les matches en direct de la compétition, ainsi que d'être toujours alerté des dernières infos relatives à une équipe ou à un joueur, comme une actu à son sujet, une vidéo ou une interview. La compétition, elle, a commencé la nuit dernière. La saison régulière s'achèvera en juin (le calendrier est à retrouver ici). Les playoffs et la phase finale se dérouleront lors du mois de juillet. Enfin, pour être complet, sachez que les rencontres de l'Overwatch League se dérouleront chaque semaine du mercredi au samedi, toujours au même endroit, à la Blizzard Arena de Los Angeles. Et que si vous êtes sur place, il y a toujours la possibilité d'obtenir un ticket.

Mais... une audience et un intérêt à mesurer

C'est là que le point d'interrogation se pose. Le projet est très ambitieux sur le papier mais il pourrait être freiné par une donne importante : l'audience. Il est encore trop tôt pour dire si celle-ci sera au rendez-vous. Et beaucoup trop tôt pour savoir si le grand public - le vrai nerf de la guerre, plus que les observateurs habituels, évidemment - suivra. Si Overwatch est un jeu de tir à la première personne massivement joué à travers le monde, qu'il se joue en équipes de six contre six et que son univers artistique est tout à fait digne d'une bande dessinée (commercialisée depuis), il ne parle pas à tout un chacun et sa lisibilité à l'écran est loin d'être évidente. De plus, pour son intérêt, il serait bon que dans un proche avenir, d'autres franchises européennes ou asiatiques voient le jour, ce qui pourrait être le cas : si elle est constituée de 12 équipes, l'Overwatch League devait initialement en compter 16. Et Blizzard espère bien constituer une Ligue à 28 franchises. Cette première saison pourrait donc constituer un sacré levier d'attraction au moment de lancer un nouvel appel d'offres pour d'autres slots. A condition que celle-ci soit un succès.

Seuls les chiffres de vente de billets et, bien sûr et surtout, le nombre de viewers sur les différentes semaines de compétition feront office de juges de paix. L'optimisme est évidemment de rigueur chez Blizzard, qui croit énormément en ce projet, malgré l'absence de toute retransmission TV. Volontaire d'ailleurs. "Après la première saison, nous évaluerons son succès, qui sera basé sur la façon avec laquelle nous aurons fait grandir notre audience, a récemment confié le responsable de l'Overwatch League, Nate Nanzer, au Huffington Post. L'eSport est un produit naturellement digital. La télévision peut jouer un rôle intéressant, particulièrement à l'international (...) Nous avons un regard global sur la télévision, de façon à voir si (retransmettre l'OWL par son biais) a du sens (...) mais nous pensons réellement qu'il s'agit d'un produit digital." 

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Alix Dulac