
Pescheux : « Le cyclisme a retrouvé toutes ses couleurs »

Jean-François Pescheux - -
Jean-François, que ressentez-vous au lendemain de votre dernier Tour de France en tant que directeur de course ?
On a toujours un petit pincement au cœur mais c’était décidé de longue date. J’ai pris la décision de prendre un peu de recul pour former quelqu’un d’autre (Thierry Gouvenou, ndlr) car ce n’est pas une fonction habituelle. Il faut être en relation avec les équipes, les fédérations, il faut connaître parfaitement les règlements. Et puis il y a les imprévus à gérer et ça ne s’apprend pas du jour au lendemain. Il était temps pour moi de passer la main et de prendre une vraie retraite en 2015.
Que pensez-vous de cette édition 2013 ?
On a été servis. Les coureurs ont utilisé parfaitement le parcours. On a retrouvé un cyclisme à l’ancienne, avec des bordures. On n’avait pas vu ça depuis une vingtaine d’années. Et puis en montagne il y a eu des retournements de situation avec un Chris Froome impérial dans les Pyrénées mais beaucoup moins fringuant dans les Alpes, où il a subi quand même les assauts de ses adversaires. C’est le cyclisme qui a retrouvé toutes ses couleurs.
Pour cette 100e édition, l’organisation a aussi tenu à dessiner un parcours splendide…
Le Tour est une compétition sportive mais, à côté de la compétition, il faut associer tout ce que la France a comme patrimoine ou histoire. On l’a toujours fait sur le Tour avec le viaduc de Millau, le pont de Tancarville, le tunnel sous la Manche. A chaque fois qu’il y a une nouveauté, le Tour de France essaie le plus vite possible de passer en-dessous ou au-dessus et de visiter les principaux monuments en France.
« La nouvelle génération a compris qu’il ne fallait plus déconner »
Quel est votre sentiment sur la victoire de Christopher Froome ?
C’est une consécration car il a failli gagner le Tour l’an dernier (2e place, ndlr). Il était le plus fort mais avait attendu Wiggins. Ce n’est pas une révélation mais une confirmation de ce qu’on savait. Il a gagné toutes les épreuves auxquelles il a participé depuis le début de la saison. Il a fait une préparation formidable avec la Sky, qui est une équipe très professionnelle. Malgré tout, ses équipiers étaient un peu moins forts que l’an passé.
La suspicion autour de Christopher Froome a été omniprésente sur ce Tour de France. Comment vivez-vous cela ?
J’en ai un peu marre de parler des suspicions car ça vient de gens dont on ne connaît pas la qualité, qui sont dans leur fauteuil et qui disent qu’il est monté plus ou moins vite que d’autres. Je suis au cœur de la course toute la journée et je sais ce qui se passe dans le peloton : il y a des malades, le vent, la pluie, les conditions de course. Et ces gens-là n’en ont pas connaissance. Le cyclisme est passé par une phase très difficile mais c’est le seul sport qui a su faire le ménage et qui a su virer tous les gens qui n’étaient plus aptes à être dans le cyclisme. On est reparti sur de bonnes bases. On est à un tournant puisque l’ancienne génération (Evans, Contador,…) va s’en aller car elle ne peut plus suivre et une nouvelle génération avec Froome, Quintana, Pinot, qu’on va j’espère revoir dans les prochaines années. La nouvelle génération a enfin compris qu’il ne fallait plus déconner.
La victoire de Christophe Riblon à l’Alpe d’Huez n’est-elle pas l’arbre qui cache la forêt pour les coureurs français ?
C’est une belle victoire pour un bon coureur, qui sait courir. C’est l’ancienne génération aussi, donc il faut chercher parmi les jeunes qui vont nous faire rêver ces prochaines années. Malheureusement, j’ai l’impression que dès qu’un jeune Français marche un peu, on lui fait croire qu’il est capable de gagner le Tour de France, or il y a énormément de marches à franchir. Et je pense qu’ont les fait franchir un peu trop rapidement à ces coureurs. Est-ce que la mentalité des coureurs français fait qu’ils ont encore la foi pour gagner le Tour comme Bernard Hinault ?
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