
Yacoubou : "Les Guerrières, ça me va très bien !"
Isabelle Yacoubou, à quoi avez-vous pensé après la victoire contre l’Espagne vendredi soir, deux ans après la défaite en finale de l’Euro en France contre cette équipe ?
Moi, j’ai eu une pensée pour Edwige Lawson. Elle prenait sa retraite, je me rappelle de ses larmes. C’est une grande dame du basket français. La voir dans cette état-là, ça m’avait beaucoup touchée. Je lui ai envoyé un message, d’ailleurs. Elle m’a dit « merci les filles, maintenant on est bien ». Au-delà de nous, en tant que joueuses, il y a beaucoup de personnes que ça avait marquées. C’est une petite revanche pour toutes ces personnes. Ça a un goût très, très sucré ! (Rires)
« Les Braqueuses », c’est fini. Aimeriez-vous « les Guerrières » comme nouveau surnom ?
Ça me convient. Il y en a qui disent que c’est le surnom des joueuses de Villeneuve d’Ascq mais je pense que c'est par rapport à ce qu’on dégage. On est passées en mode guerrières parce qu’on a compris qu’il ne fallait rien lâcher. Moi, hier (vendredi), je vois Céline Dumerc impactée. Contre la Russie, elle a pris des pains à droite, à gauche. Moi, il y a mon dos. Endy Miyem s’est fait mal aussi. On avait beaucoup de bobos. Malgré ça, on arrive à se dire : « On y va, on se retrousse les manches et on repart à la guerre. « Les Guerrières », moi, ça me va très, très bien. Ça donne en plus un côté plus dynamique à l’équipe.
Vous attendez-vous à une belle bataille contre la Serbie ?
Oui. Il faut ça. C’est ce qui est bien. Aller chercher un titre, ça ne se passe pas dans la facilité. Ce sera un autre combat. Je pense qu’on est prêtes pour ça. Ça fait longtemps qu’on se prépare pour ce moment-là. Ce sera face à la Serbie. Tant mieux ou tant pis pour elles. On ne pensera qu’à nous et à ce qu’on veut faire.
Elles ne lâcheront rien…
Cette équipe a beaucoup étonné dans ce championnat d’Europe. Elles sont arrivées avec beaucoup d’énergie. A mon avis, le retour de Sonja Petrovic leur fait énormément de bien. On connaît leurs qualités offensives. Elles sont très adroites et ont de l’agressivité vers le panier avec les sœurs Dabovic. Il faudra essayer de les contrôler, dès le début du match, pour ne pas qu’elles s’enflamment. Ce sera un peu à l’image du match contre l’Espagne. Contrôler en première mi-temps, les impacter physiquement, courir. Si on est fatiguées, elles le sont encore plus parce qu’elles ont moins de rotation. Les joueuses majeures jouent plus de 30 minutes. Il faut nous appuyer sur ce qu’on fait de mieux : l’intensité, la défense et passer la deuxième vitesse quand ce sera le moment.
« On ne joue pas un joli basket »
L’équipe de France a-t-elle changé en quarts de finale contre la Russie ?
Ce championnat est particulier. On ne joue pas bien. On ne joue pas un joli basket, esthétique, qui déroule. Mais on s’attendait à ça. Sur un championnat d’Europe qui précède les Jeux, tout le monde veut ce ticket-là. Ce n’est pas facile de jouer le basket dont on a envie. Il y a des équipes qui jouent sur leurs qualités, sur le flopping, comme on l’a vu lors de certains matchs, sur de la tricherie quelque part. On n’a pas très bien joué, mais on gagne. L’équipe a toujours été motivée par les objectifs qui étaient les nôtres dès le départ, mais on a compris que pour arriver au meilleur de la forme de l’équipe, chacune doit se sacrifier, apporter mais en se bridant un peu soi-même. Si une fille ne joue pas, elle est frustrée personnellement mais elle est là pour l’équipe. Elle donne de la voix, elle encourage. On a toutes compris ce qu’il faut emmener. Moi, je sais qu’on va me demander de sécuriser le rebond dans les dernières minutes. Chacune amène quelque chose de différent pour rassurer les copines. C’est plutôt positif de savoir qu’on est capable de se mettre un peu au deuxième plan et au service de l’équipe.
Pensez-vous beaucoup au fait que vous allez devenir bientôt maman en adoptant ?
Oui, évidemment. Mais je suis déjà maman, les papiers sont déjà prêts ! En plus, pour la première fois, ma mère a pris l’abonnement à la maison et ils regardent. Je reçois des vidéos de mon fils qui pointe la télévision en disant « Maman, maman ». C’est des larmes de joie. J’y pense. Et ça donne de l’énergie. Les corps sont fatigués. On va chercher l’énergie là où il y en a. La famille, c’est une source d’énergie intarissable.
Votre vie pourrait être un roman, avec la demande en mariage, les expériences en Chine, en Russie, en Italie…
Mon mari veut le faire ! Bon courage, parce qu’il lui faudra un peu de temps. J’ai vécu beaucoup de choses, de belles choses. D’autres moins belles, parfois. Pour moi, toutes les expériences ont été belles, m’ont apporté quelque chose. Même si ce n’est pas toujours positif, on arrive à récupérer des enseignements. Ça t’apprend sur toi-même, ce que tu aimes, ce que tu n’aimes pas. J’ai eu la chance de pouvoir vivre toutes ces expériences intensément. Je suis chanceuse.