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Kilian Jornet, les secrets d’un champion d’exception

Kilian Jornet en action.

Kilian Jornet en action. - DR

De passage à Paris pour promouvoir « Déjame Vivir », le second volet cinématographique de son projet intitulé « Summits of my life » dont l’objectif est de battre le record d’ascensions et de descentes des plus hauts sommets de la planète, Kilian Jornet s’est livré à RMC Running. Mode de vie, fréquence et charges d’entraînement, alimentation, sommeil, gestion de son statut d’idole, la star mondiale du trail se dévoile.

Son mode de vie

« Je dors environ sept heures par nuit, c’est suffisant. L’après-midi, je ne fais jamais de sieste. Je préfère lire ou travailler. Mais c’est un tout qui doit te maintenir en équilibre, avec le sommeil, l’entrainement, l’alimentation, la vie personnelle et sentimentale. Quand ton état d’esprit trouve le bon équilibre, c’est là où tu te sens bien. Côté alimentation, je mange un peu de tout mais pas beaucoup de viande parce que ma mère est végétarienne. J’essaye de manger le plus naturel et biologique possible, des produits régionaux. Mais j’aime aussi beaucoup le chocolat et les desserts ! »

Son entraînement

« Au repos, mes pulsations oscillent entre 33 et 34, jusqu’à presque 200 pulsations par minute en plein effort, pour une VO2 max de 88-92. Avec l’entraînement, le travail et la motivation, tout le monde peut s’améliorer. Moi, je ne cours que six mois dans l’année, de mai à octobre, car l’hiver, je fais du ski-alpinisme. Je cours tous les jours, sauf quand je suis en voyage, dans l’avion ou en promo. En tout, je ne me repose qu’une quinzaine de jours par an. Le matin, si c’est une petite séance, je pars courir seulement 2-3 heures. Plus 1h-1h30 l’après-midi. Si elle est longue, c’est 7-8 heures. Je cours toujours en montagne, je ne fais jamais d’entraînement sur route. Comme j’ai des bases en raison de mes études de Staps, je m’entraîne au feeling. Et l’expérience m’aide aussi. »

Son statut de star

« Je n’y fait pas trop attention parce que si tu vis que pour ça, tu perds ta personnalité. On peut être inspiré par des personnes, mais je ne me considère pas comme un modèle. Il ne faut pas suivre quelqu’un de façon aveugle sinon on perd sa propre personnalité. Du coup, j’essaye de rester un peu éloigné de ça. Je vis ma vie pour moi, sans influence, pas pour les autres. C’est ça le plus important pour être cohérent avec moi-même. »

Sa communion avec la nature

« Une journée sans montagne ou sans courir, ce n’est pas une vraie journée. Comme si ce genre de journées ne comptait pas. D’une manière générale, la course à pied ou le sport à la montagne, c’est une façon de vivre en cohérence avec les valeurs que j’ai, avec mon corps. Car nous sommes des animaux et on a besoin de bouger. La ville n’est l’endroit où je me sens le plus à l’aise, où je suis le plus « confortable ». Du coup, je m’organise pour venir dans une ville comme Paris quand je ne cours pas. Comme la semaine dernière j’ai fait beaucoup d’heures d’entraînement en montagne et que j’étais vraiment naze et crevé, j’en ai profité pour placer ma journée de récupération. Dans ces conditions, je suis content de venir en ville. »

Un avenir sur marathon ou sur route ?

« La route, ça m’a un peu tenté quand j’étais petit ou plus jeune, mais après, je me suis vite orienté vers le ski-alpinisme qui est l’opposé de la course à pied puisqu’on travaille en force plus qu’en légèreté. Si je devais me préparer pour un marathon, ça m’handicaperait en montagne. Or la montagne, j’en ai besoin. Et puis, il faut savoir que je n’ai jamais couru plus de 10km sur la route. C’était l’an passé à l’occasion des 10km de L’Equipe. Même si ça reste de la course à pied, pour moi, ce sont deux sports complètement différents. L’entraînement comme les capacités y sont spécifiques. »

Son conseil aux runners

« Il faut s’écouter, bien tester les choses en termes d’alimentation. En compétition, il faut bien évidemment bien s’hydrater, mais on peut rajouter un peu de jus ou de sirop pour mieux s’hydrater. Côté alimentation, manger un peu de salé sur des longues distances peut faire beaucoup de bien. Le salé pénètre bien dans l’organisme, et ça change du sucré. Mais le plus important, c’est de garder le plaisir à l’entraînement. Même si parfois c’est dur d’aller s’entraîner et qu’on n’en a pas envie, il faut garder le plaisir intact. Ne pas prendre ça comme une obligation. »

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Prochain défi : l’Everest !

Après avoir vaincu à pied le Mont Blanc, le Cervin, l’Elbrouz, le McKinley et l’Aconcagua, Kilian Jornet s’attaquera au printemps prochain au dernier volet et morceau de taille de son projet « Summits of my life » : le record d’ascension et de descente de l’Everest. « Ca prendra du temps, ce sera une première tentative car je ne pense pas que ce sera la bonne, assure l’Espagnol. Ca prendra peut-être plusieurs années car il faut être patient, attendre les bonnes conditions de la montagne (sic) et avoir peur. Il faut garder cette peur car c’est cette peur qui nous alerte, nous fait faire demi-tour. » Dans l’idéal et quand toutes les conditions seront réunies, Jornet espère dompter le plus haut sommet de la planète à l’issue de 24 à 40 heures d’effort.

Gérald Mathieu