
Ewanjé-Epée: "Un système à la limite du mafieux"

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L’Agence mondiale antidopage (AMA) a réclamé ce lundi la suspension de la Russie de toutes compétitions officielles dans le cadre du scandale de corruption qui secoue la Fédération internationale d’athlétisme. Une suspension à vie a également été demandée contre cinq athlètes russes. « Il était peut-être plus que temps, réagit Maryse Ewanjé-Epée, membre de la Dream Team RMC Sport. C’est déjà arrivé dans d’autres fédérations. On l’a vu notamment en haltérophilie, où il a fallu à un moment donné faire table rase d’une fédération qui était gangrénée par le dopage. On a enlevé tous les records du monde et on est reparti complétement à zéro. »
« La suspension de la Russie ? On va mettre un pansement sur une jambe de bois. C’est très bien, de toute façon, il faut suspendre certaines fédérations. Mais si on se met à suspendre les fédérations, il faudrait peut-être aller au-delà de la Russie. Et puis surtout, au lieu de s’intéresser en permanence au bout de la chaîne, c’est-à-dire aux athlètes, il faudrait peut-être soulever le tapis et essayer de savoir qui est au début de la chaîne. »
« Il va falloir s’intéresser à qui finance le dopage »
« Moi, j’ai du mal à comprendre qu’un athlète qu’on fait chanter, même excellent, puisse sortir de grosses sommes d’argent comme ça. Il faut savoir qu’une médaille d’or en Russie rapporte environ 90 000 dollars et une voiture à son bénéficiaire. On est très loin du demi-million de dollars qui a été réclamé à Liliya Shobukhova, celle par qui le scandale est arrivé. Donc cet argent a été fourni par quelqu’un et c’est ce quelqu’un qui nous intéresse. En ce qui concerne la Fédération internationale, j’ai du mal à imaginer qu’on soit dans un dopage institutionnel. Je pense plutôt à des fautes d’hommes. Des hommes qui sont probablement trempés dans un système beaucoup plus vaste que ça. »
« Derrière certaines malversations à la Fédération internationale, il y a probablement un système parallèle qui est à la limite du mafieux et qui soutient le dopage depuis toujours. Donc il y a la lutte antidopage d’un côté et un système plus ou moins mafieux de l’autre. Il va falloir qu’on dépasse simplement l’athlète et la suspension pour dopage. On pourrait parler d’athlètes de tous les pays. Je ne vois pas pourquoi on imaginerait que d’autres pays soient plus corrompus que le nôtre. Dans la mesure où on parle d’un système qui peut dépasser certains hommes et le cadre d’une fédération, ça peut arriver à toutes les fédérations. Je crois malgré tout que la Fédération française d’athlétisme lutte depuis longtemps sur ce problème du dopage. En 2003, lors des championnats du monde, elle avait elle-même avait mis sur le devant de la scène un athlète français qu’elle estimait dopé (Fouad Chouki, ndlr). Mais il va falloir vraiment s’intéresser à qui finance le dopage. »